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Un Français sur dix malade de l'alcool selon un rapport
LEMONDE.FR | 24.11.05 | 08h26 • Mis à jour le 24.11.05 | 08h40
Un Français sur dix est malade de l'alcool et chaque jour, cinq personnes meurent d'un accident lié à l'alcoolisme. Ce constat est dressé dans un rapport de mission remis au ministre de la santé, et signé par Hervé Chabalier, fondateur et directeur de l'agence de télévision Capa, qui a lui-même souffert des ravages de l'alcool (Le Dernier pour la route, 2004, éditions Capa).
Le rapport souligne que cinq millions de personnes ont une consommation abusive, dont 2 millions sont dépendantes de cette "drogue". Chez les plus jeunes, 700 à 3 000 enfants sur les 750 000 qui naissent chaque année sont susceptibles d'être atteints d'un syndrome d'alcoolisation fœtale (SAF) grave, et donc d'être handicapés, parce que leurs mères ont bu pendant leur grossesse. L'alcool est aussi "la première cause de mortalité des jeunes".
L'alcool tue directement, selon les experts, 23 000 personnes par an, et est impliqué dans 45 000 décès si l'on prend en compte d'autres éléments comme la violence ou les accidents. L'alcool est impliqué dans 10 à 20 % des accidents du travail et à l'origine de 2 700 morts sur la route par an. Le rapport souligne aussi que la diminution progressive de la consommation d'alcool depuis les années 1960 a été suivie d'une diminution proportionnelle et significative de la mortalité par cirrhose et par cancer (bouche, œsophage...).
"LUTTER CONTRE LE DÉNI"
"L'alcool, c'est aussi un fardeau financier pour la collectivité supérieur à celui du tabac et des stupéfiants réunis : 1,42 % du PIB, soit 17,53 milliards d'euros contre 0,8 % pour le tabac et 0,16 % pour les stupéfiants", explique l'auteur du rapport. Toutefois, il pointe la faiblesse de la prise en charge des personnes ayant des problèmes avec l'alcool : à Paris et en Ile-de-France, il existe 245 lits d'alcoologie, représentant 5 260 hospitalisations possibles, pour un peu plus de 550 000 malades alcooliques. Ce rapport sur l'alcool, moins académique dans la forme que les précédents, brocarde l'Etat, dont l'engagement fait défaut et dénonce des initiatives "pousse-au-crime" de certains parlementaires en faveur du vin de terroir.
Hervé Chabalier fait neuf recommandations. En premier lieu, "faire de la lutte contre l'alcoolisme une grande cause nationale" et "admettre que l'alcool n'est pas un produit ordinaire : c'est une drogue". "Reconnaître l'alcoolisme comme une maladie progressive" sans attendre ses stades extrêmes (cirrhose, greffe du foie). "Lutter contre le déni : grâce à des médecins qui veillent, des conseillers qui détectent, des groupes d'anciens buveurs qui interviennent" et "associer l'éducation à la sanction". En plus de l'aide aux proches, du rôle de l'entreprise dans la prévention, il préconise de "décider urgemment des mesures spécifiques à destination des jeunes".
La publication de ce rapport intervient deux jours à peine après celle d'une enquête de l'Insee qui indiquait que 7 % des Français ont une consommation "excessive" d'alcool. L'institut de statistique indique aussi que quelque 40 % des adultes sont obèses ou en surpoids et près de 25 % fument quotidiennement. Les hommes sont plus touchés par ces facteurs de mortalité prématurée (75 % contre 56 % chez les femmes), et ils le sont de plus en plus en vieillissant : 84 % des hommes de 45 à 59 ans sont concernés par un de ces comportements à risque. Après l'âge et le sexe, c'est le niveau d'études qui semble faire la différence : les plus diplômés sont moins souvent sujets au tabagisme ou à un excès de poids, mais ils sont davantage enclins à boire.
Avec AFP et Reuters