Un petit appel...
SORTIR DE LA VIOLENCE
Les violences qui ont touché les quartiers depuis maintenant plus de 10 jours entraînent de notre part une réprobation totale. En effet, nous n’oublions pas que les premières victimes de ces violences, en termes matériel et médiatique, ne sont autres que les habitants de ces quartiers.
Nous appelons les jeunes qui seraient prêts à suivre l’exemple de quelques émeutiers qui s’attaquent aux édifices, aux personnels publics mais aussi aux lieux de vie des quartiers, de s’écarter de cette tentation. Si des jeunes voyaient dans la violence un moyen d’exprimer leurs ressentiments, ils tomberaient dans la facilité d’une brutalité qui touche des personnes rencontrant les mêmes difficultés qu’eux.
Malheureusement, ce qui se déroule sous nos yeux depuis plusieurs jours renvoie à des maux profonds qui rongent les quartiers depuis de trop nombreuses années.
Si l’on veut sortir par le haut de la crise urbaine qui secoue la France, la seule réponse en terme d’ordre public n’est en rien adaptée. Il faut répondre dans la clarté et dans les actes au sentiment de frustration ressentie par une partie importante de la jeunesse des quartiers.
Trois points sont, dans l’urgence de la situation, incontournables :
Tout d’abord, le déclenchement des émeutes urbaines a trouvé sa cause, comme à chacune de ces situations similaires, dans les relations conflictuelles entre les jeunes et la police. La Police, parce qu’elle est souvent un des derniers représentants de la présence de l’Etat dans les quartiers, concentre sur elle toutes les attentes et toutes les frustrations. Mais comment peut-elle être efficace quand le seul axe d’intervention qui lui est assigné est la répression ? Quand la formation des policiers n’est en rien adaptée à la réalité sociale du pays ? Quand les policiers les moins expérimentés se retrouvent dans les quartiers les plus difficiles ? Face à une situation à laquelle ils ne sont pas préparés, ils sont, trop souvent, tentés de gagner leur autorité par des mesures vexatoires (contrôles aux faciès, etc…).
Ensuite, la réalité quotidienne des habitants des quartiers, et notamment des plus jeunes, est marquée du sceau des discriminations, qu’elles soient liées à l’origine ethnique ou tout simplement au lieu d’habitation. Pour des millions de personnes qui dans leur recherche d’emploi et de logements vivent la discrimination, le principe de l’égalité républicaine s’arrête aux portes des quartiers. Or, si tout le monde reconnaît aujourd’hui cette réalité, où sont les actes concrets des pouvoirs publics afin de lutter contre ce fléau ?
Faute de réponses valables, les discriminations créent une frustration chez des jeunes, touchés beaucoup plus fortement par le chômage que le reste de la population. Ils se retrouvent assignés à résidence, faute de pouvoir accéder à d’autres lieux d’habitation.
Enfin, la crise actuelle relève aussi de l’état d’abandon dans lequel le secteur associatif a été laissé ces dernières années. La restriction des crédits et la suppression des emplois-jeunes au niveau national, la tentation de la « caporalisation » des associations par les pouvoirs publics locaux ont conduit à un étiolement sans précédent du tissu associatif. Lorsqu’on ajoute à cela la disparition des services publics et la réalité de politiques urbaines qui s’intéressent au bâti sans se soucier réellement des gens qui y habitent, nous obtenons ce que nous voyons actuellement : un sentiment d’abandon par une République qui se drape dans ses principes d’égalité et de fraternité sans se soucier de leur application. Comment par exemple accepter que les écoles classées ZEP ne puissent pas, faute de moyens, jouer à plein leur rôle d’ascenseur social ?
Ces trois points structurent aujourd’hui une ghettoïsation qui avance à grands pas. Il est de la responsabilité des pouvoirs publics de répondre dans la clarté à cette réalité. Non pas par des mesures de rafistolage mais par des réponses lisibles et d’ampleur. Des réponses pour rendre leur dignité aux gens, tout simplement. Car le problème n’est pas tant les conditions de vie actuelles des gens qui vivent dans les quartiers mais l’impression – légitime – qu’ils ont qu’il n’y a que peu d’espoir pour eux de sortir de leur situation.
C’est pourquoi nous appelons les pouvoirs publics à ne pas se limiter à la mise en scène d’un dialogue avec les « jeunes des quartiers ». Si les pouvoirs publics se contentaient d’emprunter cette voie, ils donneraient un peu plus l’impression de l’existence d’un fossé tragique entre leurs réponses et les préoccupations des habitants des quartiers. Ce que nous demandons, c’est une table ronde réunissant l’ensemble des parties prenantes – Etat, collectivités locales, associations, représentants des policiers, des enseignants et des travailleurs sociaux – afin de déboucher sur des propositions concrètes.
Envoyer votre signature à
region.parisienne@sos-racisme.org ou en contactant Linda Drici au 06.80.47.00.69.
Premiers signataires :
SOS Racisme ; Farid SAIDANI, travailleur social (Val d'Oise) ; Association Zy’va (Nanterre) ; Benjamin MOIGNARD, responsable associatif (Evry) ; Association Ulys en mouvement (Essonne) ; Abdenor KEZZAL, Président de l'association des jeunes du Franc Moisin (Saint Denis) ; Fouad DOGGA, Président fondateur du Plaisir d'Apprendre à la cité de l'Europe (Aulnay Sous Bois) ; Elimane SOUSSOKO, Président de Développement Europe Mali (Villiers le Bel); Abdelnacceur BEN M'CHARECK, Président de l'ASEP 13 (Villetaneuse) ; MJC (Fresnes) ; Moulay TAYEB (19ème) ; Association Bulles d’oxygène (19ème); ASCISM Traduction (Association Pépinière Mathis) (19ème) ; BGA (19ème) ; Association Jet Handicap ; Association Evasion (19ème) ; Association Action Fraternelle (19ème) ; Mme Yonelle DELLE (19ème) ; Jean Pierre PASTIER, animateur socioculturel (Sanit Frageau-Ponthierry) ; Fédération des acteurs citoyens (Grigny) ; Association comorienne (Grigny) ; Marveen CHALMEFFIN, éducateur spécialisé (Vitry) ; Patrick PAROS, animateur socioculturel (Grigny) ; Reda BOUDAOUD, directeur MJC (Créteil) ; Djamel FEMMAMI maire adjoint à la politique de la ville (Sevran) ; Mohamed ZAOUI (ACAFI) ; Association JPROD (Grigny), Comité de liaison d’associations pour la promotion des immigrés en Alsace (Strasbourg), Léo Lagrange (Picardie), Diaspora active (Oise), Cercle Républicain (Oise), Association des Travailleurs Africains de la Picardie (Picardie), Association des Femmes Africaine de Compiègne (Compiègne), Association des Médiateurs et Médiatrices Interculturels (Picardie), Eric ALBEROLLA, président de la maison des potes (Narbonne), Patrick NIELS, éducateur (Lons le Saunier), Abdou CHAOUI président du Boulevard des Potes (Bordeaux),Jacques LEBEAU directeur club prévention (Bordeaux centre), Abdelhake BOUMANSOUR animateur de développement socio-urbain (Bordeaux) ASSEM (Toulouse le mirail), association TEO7 (toulouse Reynerie), Association GM99, Marie MAZZICO assistante sociale (nice), Ligue Cojepienne ( éducation populaire strasbourgeoise), Arthur LEGENDRE de l’association de quartier JADR (Nantes), Amandine PICARD de l’association Vélo Campus (Nantes), Ali HOUMADI THOURAYA travailleur social (Nantes), Didier VARTEL éducateur (Nantes), Margot GERVAIX de l’association de solidarité internationale Toubab A Kanell (Nantes), Ryad ASSELAH animateur en centre socioculturel (Nantes), Toufik HADDAD de l’association Unis-cité (Nantes), Zaima EL MAHDI responsable associatif (Nantes), Olivier GILLES directeur CRIJ Pays de Loire, Caroline LERESTE directrice régionale de l’AFEV (Nantes), Association Jeunesse Africaine 58 (Nièvre), Ldh 58 (Nièvre), Foyer d’insertion de jeunes travailleurs Georges BEAUCAULT (Nièvre), Centre social IMPHY (Nièvre), Centre socioculturel de la BARATTE (Nièvre), AFPLI 58 (Nièvre), Centre social et maison de quartier de la grande Pâture (Nièvre), centre social de Verpré (Nièvre), Centre social de Banlay (Nièvre), Maison du quartier des Montôs (Nièvre), Association les Courlis (Nièvre), Belagacem AMARA médiateur social (Limoges), Regis HUERTAS directeur de la maison de quartier de BEAUBREUIL ( Limoges), Marion AL ACHKAR association B58 (Limoges), Stéphane CHASTRUSSE médiateur à VAL de L’AURENCE ( Limoges), Ali SAHAB éducateur (Belfort), Manuel FIGUEIREDO éducateur (Belfort), Florence CHEMLA éducatrice (Belfort), Eric PAGUET éducateur (Belfort), Nagim EL ATOUIANI animateur social (Marseille)