Prologue
Bon, c'est un peu pompeux comme nom de dessert, donc on va appeler ça plus modestement "PiccoSpace", ça sonne bien c'est fun c'est fly ça roule les jeunes.
En fait, mon frangin m'a refilé les trois plantes qui fleurissaient sur sa terrasse, mais comme et d'un y en a pas des tonnes et de deux le goût est pas super et de trois l'effet est sympa, je me suis dit: tiens, en voilà une bonne opportunité pour m'essayer dans les recoins intimes et inconnus des fourneaux.
Que je me suis dit. Comme ça.
Chapitre 1
Il vous faut donc:
150g de beurre de marakesh (on va bien doser, pour être bien pété hein les gars? ) (la recette est sur le site)
250g de chocolat "dessert" (parce que le chocolat "dîner" est un peu trop salé, et en plus j'aime pas les anchois)
4 oeufs
120g de sucre en poudre (attention, ne pas confondre avec le paquet de sel juste à côté)
80g de farine (attention, ne pas confondre avec le paquet de cocaïne juste à côté)
100g de noix de pécan
1 casserole
1 moule carré ou rond (suivant que vous voulez faire de vrais brownies de chez vrais et les couper en recangles, ou suivant my way à savoir que vous êtes pas crésus et que les moules à tartes rond sont moins cher)
1 cuiller en bois (pour pas ruiner votre belle casserole qui est en fait déjà rayée parce que la fois passée vous aviez pas de cuiller en bois mais cette fois, je vous donne le bon truc que personne ne sait: utiliser une cuiller en bois, parce que comme ça ça fait pas de rayures sur les casseroles neuves) (Avouez que vous ne le saviez pas)
un rouleau de papier à cuisson, ou, pour les grands chefs dignent de ce nom comme je le suis moi-même depuis une bonne heure, du papier "sulfurisé" (ah, oui, ce serait quand même dommage voir cyniquement ironique que votre prétendu moule "spécial anti-adhérant" adhère toutefois dès la première cuisson) (et quand le choco adhère, il adhère) (oui, prenez un rouleau parce que croyez-moi, vous en referez )
Chapitre 2
Et c'est parti pour un quart d'heure de folie
faite fondre à feu extra powerful les 150g de beurre de marakesh et les 250g de chocolat. Ne remuez pas avec la cuiller en bois. Quand le tout forme une croûte noire et sèche au fond de votre casserole, arrêtez le feu et allez racheter du chocolat, du beurre et de l'herbe. Toute votre bon beurre de Marakesh est à refaire.
Chapitre 3
Maudissez l'auteur de ce texte, et faite fondre le nouveau beurre et le nouveau choco (les deux ingrédients coupés en morceaux, ça va plus vite) dans la casserole A FEU DOUX. Pour le deuxième essai, on ne sait jamais, ça mange pas de pain. Touillez FREQUEMMENT avec la cuiller en bois. Autant mettre toutes les chances de nôtre côté.
Oh, stupeur, le tout forme un mélange homogène et onctueux. Il est donc temps d'arrêter de touiller mes frères. Et de retirer la sainte casserole contenant le délicieux choco marakesh du feu, allelouya gloria. Faites l'effort de ne pas lécher la cuiller en pensant que vous aurez les restes conséquents de la casserole, vu que vous n'avez pas de spatule en plastique mou sous la main et que tout ce que vous n'arriverez pas à foutre dans le moule avec cette maudite cuiller en bois vous sera délivré directement dans le palais un peu plus tard...
Il est temps de déflorer cette pureté culinairement saine en ajoutant les 120g de sucre. Pardon, c'est vrai que ça ne fera qu'en rajouter à la pureté de la chose. Touillez touillez touillez allez touillez encore allez allez on touille ouah c'est mou allez hop, on touille. D'ailleurs, c'est bien simple: le plus on touille, le meilleur ce sera. La première fois que j'en ai fait, la semaine dernière, fort de cette légende en tête, j'ai touillé pendant 2 jours et 2 nuits. Eh ben c'était les meilleurs PiccoSpace que j'ai jamais goûté. (D'ailleurs, c'était la première fois que j'en goûtais mais bon, passons.)
Quand le tout est redevenu onctueux (ou, au choix, quand il n'y a plus de gros tas de sucre sur un flot de choco et que vous avez plus ou moins réussi à recouvrir ledit tas avec ledit flot. Mais alors là faut continuer à touiller), il est temps de faire des phrases moins longues et de rajouter un oeuf. C'est là la manoeuvre la plus délicate de l'affaire, car, si un bout de coquille venait malheureusement à tomber par mégarde dans la miction, le PiccoSpace risque bien de devenir un tirage des Rois! Avec une fève surprise qui croutstille!
Bref, toute précautions étant prises, vous rajoutez un oeuf, et vous touillez. Touiller touiller touiller et encore touiller. Eh ouaip, la cuisine c'est pas une partie d'plaisir les gars. Ouaip, d'ailleurs Bronco Billy me l'a dit la semaine dernière alors voyez les gars.
Et puis il est temps de rajouter un deuxième oeuf. Et de touiller touiller touiller touiller.
Et puis devinez quoi? Il est temps de rajouter un troisième oeuf. Et de touiller touiller touiller touiller.
Et puis? Tous ensemble? Il est temps de rajouter un quatrième oeuf. Et de touiller touiller touiller touiller.
Chapitre 4
Lorsque vous vous apprêtez à rajouter un cinquième oeuf, tranchez-vous une veine avec les ongles au niveau de la carotide, vu qu'il ne faut surtout pas que le cinquième oeuf du carosse ne ramène ses gros sabots dans votre précieux mélange. C'est vrai quoi, c'est pas cet oeuf qui va ruiner notre touillage. Surtout que c'est pas fini.
Là il est temps de mettre le four à préchauffer à 150° (désolé pour les plus avancés d'entre nous, je ne connais pas le thermostat... au pif je dirai 5) et de recouvrir le fond de plat avec le papier "sulfurisé" (si vous ne savez pas ce que c'est, vous n'avez pas tout lu et je vous conseille de recommencer ce tutorial très sérieux dès le début. Il en va de l'avenir de vos PiccoSpace.) Si vous avez recouvert le fond extérieur du moule, vous n'avez rien à faire ici. J'ai pris le risque inavouable, je l'avoue, de ne recouvrir que le fond du moule et non les bords kwasi verticaux. Quel prise de risques insensés, mais il faut bien avouer que ça rajoute quelques frissons à la cuisine, ce qui n'est pas un mal.
"Bon, tu vas la fermer oui, ça va, on l'a fait alors quoi maintenant?" Alors maintenant, c'est la partie la plus amusante de la préparation. Il faut grossièrement hacher les 100g de demi noix de pécan. Utilisez votre imagination! Les doigts de pied, le chat, le meurtre enroulé dans un torchon (contre le dossier de la chaise en bois pour ceux d'entre nous qui ont le plus de cran), le pic à glace façon basic, ou tout simplement comme je l'ai fait: avec les doigts. Eh oui. Après des heures d'entraînement intense, vous aussi vous apprendrez comment casser une demi noix de pécan en quatre morceaux d'un seul geste de la main. Toi aussi, petit scarabé, tu apprendras.
Et toute les noix doivent y passer hein! Pas de pitié!
Vous rajoutez la farine, et les huitièmes de noix (Mais ma pauvre cocotte... une demi noix coupée en 4, ça fait un huitième de noix enfin quoi. Pas compliqué merde) Et vous touillez. Touiller touiller touiller touiller. Stoooooooooop! Félicitation, vous êtes arrivé au bout de la première étape.
Normalement, un quart d'heure a passé depuis que vous avez commencé cette préparation. Pour la transition, nous avons des boissons, des friandises, de la pâte brûnâtre et louche sur laquelle flotte de-ci de-là ce qu'il semble être des cadavres de cafards mais à bien y regarder ce sont peut-être des noix, et un moule à tartes rond tapissé de papier sulfurisé.
Chapitre 5
A contrecoeur, vous décidez de prendre la pâte et le moule à tarte. Soudain, surgit un démon venu de l'enfer venu spécialement pour vous, pour vous voler votre pâte. Méfiant vis-à-vis de l'intérêt porté par ce démon couvert de flamme envers votre pâte brûnâtre, vous vous sentez fier d'avoir fait le bon choix, et, rempli d'une légitime bouffée de courage et d'audace, vous décidez de l'âppâter avec les boissons et les friandises. Il se dit qu'il y perd pas au change, et déclare d'un ton fluet et quelque peu irrité comme peuvent l'avoir les vieilles institutrices acariâtres
que votre boue informe bourrée de cafards vous reviens de droit et qu'il emporte les boissons et les friandises pour la route s'cusez du dérangement m'sieur.
Tel Dieu au temps du déluge, vous voici prêt à déverser sur la planète moule à tarte un flot envahissant de pâte de choco. Rien n'y résistera, tout sera recouvert. Pauvre papier sulfurisé, quel triste sort, mourir étouffé sous le choco à son âge, si jeune! Même pas un mois depuis la sortie d'usine. Adieu, mon gars. T'étais le plus brave.
Vos adieux au papier sulfurisé terminés, le four doit maintenant être préchauffé. Une larme perlant sur la joue, vous enfournez dans la chaleur de l'enfer cette soucoupe de choco avec un léger pincement au coeur. Dans quel état le retrouverai-je? La dernière fois que j'ai eu affaire au feu, c'était pas beau à voir... (voir premier épisode, un peu au dessus)
Sur les nerfs, inquiet, couvert de sueur froide, vous allez et venez entre (votre bouquin - votre film - votre magazine à scandale - le forum de la main verte, biffez les mentions inutiles) et votre four pour surveiller la cuisson. Au bout de dix minutes, vous constatez, terrassé d'effroi, d'une pâleur cadavérique, que la pâte gonfle jusqu'à l'extrême bord du moule. Tout cela aurait il été vain? Dieu existe-t-il? Cette fucking pâte pour laquelle j'ai tant touillé débordera-t-elle lamentablement pour se répandre sur le bout de pepperoni de la pizza qui était avant elle?
Chapitre 6
Au bord de l'apoplexie, exactement 25 minutes après la mise dans le four, vous ouvrez le bec de ce maudit cracheur de flamme et vous lui arrachez le moule à mains nues. Vous hurlez de douleur mais tenez bon, si bien que le moule se retrouve sur le plan de travail de la cuisine et vos mains dans l'évier, sous l'eau froide. Vous regardez tristement cet immonde tas brunâtre la mort dans l'âme, vous êtes prêts à crier, à gémir, à pleurer, à hurler, à fracasser votre cuisine à coups de poings endoloris, lorsque vous reprenez vos esprits et appelez les urgences. Ils vous répondent qu'ils ont pas que ça à foutre et que vos jambes elles ont rien et qu'il y a un hôpital à deux pas.
Après avoir fait un petit tour à la salle des urgences pour mettre un poing sur les "i" (regarde-là de près mon urgence c'est pas urgent ça hein? Ahahhh, tu veux l'autre hein?), vous revenez chez vous, les mains bandées (à contrecoeur par un stagiaire pour vous soigner et que vous vous tiriez de là), vous pénétrez dans votre appartement, avec il faut bien le dire une petite pointe de cafard.
Chapitre 7
Lorsque vous pénétrez dans votre cuisine, vous découvrez votre chat étendu sur le sol, du choco partout sur le corps, et plus une miette dans le moule, sur le plan de travail. Vos amis arrivent une dizaine de minutes plus tard et, fous de colère de ne pas trouver la friandise promise, ils crachent sur votre téléphone portable (signe de respect chez nous) et vous maudissent sur 17,5 générations (ça, je ne connais pas la signification) Alors, vous allez vous coucher et décidez de ne plus mettre les pieds hors du lit tant que ce chat continuera à vous piquer votre bouffe.
fin.
hmmmm. Pas top-top comme fin tu crois pas? Ouais, faudrait changer ça, ça fait un peu tache tout ce touillage pour rien. Bon, on se fait une fin à la scoubidou?
tiloulou tiloulou tiloulou tiloulou
Chapitre 7
Lorsque vous pénétrez dans votre cuisine, vous découvrez que l'immonde tas informe c'est en quelque sorte affaissé dans le moule, de sorte qu'il forme un rond uniforme et plane, juste épais ce qu'il faut telle une longue contrée de choco durci désertique, renfermant une partie charnue délicieusement moelleuse et onctueuse, avec ses quelques tétons de pécan qui pointent langoureusement offerts. Et cette fois, vous pleurez de joie devant ce miracle. Il vous vient quelques images du futur où le choco a adhéré au papier cuisson, lequel a adhéré au moule, et pour combler le tout le choco a adhéré aux parois kwasi verticales du moule de telle sorte que ce dernier ne servira plus jamais à rien si ce n'est à combler un sac poubelle à moitié rempli. Mais, renforçant la stupeur générale, Le papier a splendidement fonctionné, et la surface anti-adhérente du moule a parfaitement rempli son boulot en n'adhérent pas, si bien que la phase dite de "démoulage de cake" (cherchez pas, c'est du jargon de pro) est un vrai jeu d'enfants.
Dans le doute, je continuerai à utiliser le papier cuisson.
Lorsque vous découpez le gâteau en tranche, vous avez la stupéfaction de constater que... oh... mais rho ça alors, sacré papier sulfurisé, j'te croyais cuit mon gars, ahahah, et dire que j'ai failli te trancher la tronche avec ce gros couteau, ahahah, ah c'est jamais les moins bons qui partent en premiers hein, pas une égratignure sacré saligaud.
Vous vous apprêtez à manger en schmet un premier morceau avant que vos amis n'arrivent d'ici dix minutes, lorsque vous vous tournez vers l'évier et découvrez, les yeux écarquillés par la bêtise qui vous a fait oublié ce détail, la casserole dûement munie des restes de pâte choco avec même quelques bouts de noix de pécan si vous êtes très paresseux. Vos amis arrivent, découvrent le succulent morceau de PiccoSpace qui leur était promis, et après y avoir goûté, vous portent en triomphe tel un lanceur de curling victoreux. Tout de même, que la vie est bien faite.
humbrom.
Alors ça c'est vraiment une bonne fin scoubidou! Comme quoi le kat il peut foutre la merde de temps à autres.
fin.
Epilogue
miam miam.