Cannabis: regarder la réalité en face
Lundi, le Conseil national se penchera sur la révision de la loi sur les stupéfiants. A quelques jours du débat - il aura lieu lundi, en même temps que celui sur la suppression de l'interdiction de l'absinthe -, les adversaires fourbissent leurs armes. Fustigeant les dangers que représenterait la fumette, en particulier pour les jeunes, ils appellent les parlementaires à refuser l'entrée en matière afin de renvoyer aux calendes grecques tout projet de dépénalisation. En clair, ces gens préfèrent continuer à se boucher les yeux plutôt que de faire face à un problème bien réel: le pays compte en effet largement plus de 200 000 consommateurs réguliers, et plus d'un demi-million de consommateurs occasionnels. Il est donc temps d'adapter la loi.
Car loin d'ouvrir la porte à tous les abus comme ils le prétendent, la loi révisée offre un cadre légal bien défini. Elle instaure une réglementation du marché pour les adultes et maintient une répression ciblée de la vente de cannabis aux jeunes. Un peu comme c'est le cas pour la consommation d'alcool. Bien sûr, la loi n'empêchera pas certains jeunes de s'en procurer, mais c'est déjà le cas actuellement.
Ce qui est sûr, c'est que l'adoption de cette loi ne serait en aucun cas un signe de faiblesse. Ce serait au contraire un acte raisonnable mettant fin à une lâche hypocrisie et cela permettrait d'adapter la législation à la réalité. De plus, la loi révisée mettrait un terme à une inégalité de traitement dans ce pays. Difficile en effet d'admettre que fumer un pétard est parfaitement toléré dans certains cantons alors que dans d'autres, cela reste un délit sévèrement réprimé. Un délit qui, de surcroît, entraîne des procédures pénales dont les coûts sont totalement disproportionnés par rapport à la gravité de la «faute».
Mais il y a encore autre chose: la consommation de cannabis étant interdite, il n'existe pas d'étude scientifique démontrant l'inaptitude à conduire après avoir fumé un joint. En dépénalisant le produit, on pourrait enfin mener de telles études et déterminer dans quelle mesure sa consommation est incompatible avec la conduite d'un véhicule. Comme c'est le cas avec l'alcool. Et tant mieux si, pour une fois, la Suisse pouvait faire œuvre de pionnier!
source: http://www.journaldujura.ch/front_artic ... 42&kap=bta