Actu Maroc : Cannabis : Le Maroc pourrait y gagner légalement...
Posté par Mortelune le 17/12/2004 7:51:39 (99 lectures)
Les partis politiques ont toujours adopté un profil bas lorsque le sujet de
la drogue était évoqué, alors que le fléau touche pratiquement tout le Nord
sans que ce point ne figure jamais sur leurs agendas. Mahjoubi Aherdane,
secrétaire général du Mouvement national populaire, donne un avis franc :
«Se prononcer revenait à avoir l'Etat ou la population sur le dos.
Or, je ne connais pas de partis politiques qui auraient été capables de
faire ce choix. C'est un dossier très important et il faut que l'Etat
assume ses responsabilités une fois pour toutes». Un spécialiste de la
question est d'un autre avis : «C'est d'une décision royale dont on a
besoin. Le Roi est le seul capable de trancher une fois pour toutes dans ce
dossier et lui donner de la visibilité». Le dossier du cannabis est
dérangeant à plus d'un titre. Le cocktail «drogue-immigration-terrorisme»
est jugé explosif pour le Maroc. «Le Maroc doit soigner son image à
l'extérieur. Il ne doit plus être perçu comme un pays qui abrite des
activités illégales. Le Maroc doit gérer ce dossier sachant qu'il est
dangereux pour lui», juge Sean Doyle, ambassadeur de l'Union européenne à
Rabat.
En réalité, le Maroc pourrait tirer profit de cette culture et de façon
légale. Plusieurs alternatives se profilent comme le note le professeur
Mohammed Hmamouchi, directeur de l'Insitut national des plantes médicinales
et aromatiques basé à Taounat : «Des données récentes indiquent la
possibilité de la valorisation du cannabis dans plusieurs domaines. Des
brevets pour la commercialisation de certains produits obtenus à partir du
cannabis ont aussi été recensés». Les spécialistes listent plusieurs
secteurs industriels utilisateurs de la plante verte. On y retrouve le
textile, l'industrie du papier, l'alimentation, les cosmétiques, la
construction, les peintures et vernis, le plastique et les médicaments
thérapeutiques. «D'ailleurs, la compagnie allemande Thesis, opérant dans
l'industrie pharmaceutique, avait émis le souhait de s'approvisionner
auprès des agriculteurs du Nord. Aucune suite n'a été donnée à cette
requête», indique un proche du dossier.
Aujourd'hui les grandes compagnies pharmaceutiques se bousculent pour
pénétrer ce nouveau segment à fort potentiel de croissance. Bayer AG avait
déclaré, en mai 2003, avoir passé un accord avec la société britannique GW
Pharmaceuticals(1) pour commercialiser son médicament à base de cannabis
pour la sclérose en plaques et la douleur. Il n'est pas le seul. Aux
Etats-Unis, par exemple, l'entreprise Pharmos Corporation avait déclaré
avoir obtenu l'accord de l'Office des brevets pour une demande au sujet du
dexanabinol, destiné à être utilisé dans le traitement des inflammations,
de pathologies neurodégénétratives et auto-immunes, d'ischémies du cerveau
et de douleurs(2). Et le gouvernement israélien semble appuyer cette
démarche puisqu'il a accordé une subvention de 1,7 million de dollars pour
des recherches médicales sur le cannabis.
De la recherche sur toutes les plantes...sauf le cannabis
Au Maroc, des intitiatives sont proposées dont celle de Mohammed Hmamouchi.
Ce dernier a, depuis quelque temps, introduit dans le circuit officiel, par
le biais du département de la recherche scientifique, un projet de produits
dérivés du cannabis à valeur ajoutée élevée. La réalisation de ce projet
passe, selon son auteur, par six phases importantes dont la plus urgente
est celle de l'adaptation de la législation. En effet, cette dernière
semble ne pas accompagner l'évolution de son environnement. Exemple criant
de ce déphasage : les chercheurs de l'Institut national des plantes
médicinales et aromatiques basé à Taounate, à quelques encablures de
centaines d'hectares de champs de cannabis, peuvent travailler sur toutes
sortes de plantes, sauf le cannabis.
Dans tous les cas, la balle est aujourd'hui dans le camp des responsables
marocains. Une réunion est programmée pour fin décembre entre le
gouvernement marocain, l'Agence du nord et la Commission européenne.
L'objectif est de préparer des projets alternatifs. «Nous allons écouter
les propositions marocaines et la vision du gouvernement pour le
développement du Nord. Nous allons prendre très au sérieux les propositions
qui nous seront soumises et qui intégreraient la question de la drogue»,
commente l'ambassadeur européen.
Aniss MGHRI
Source : La Vie Economique