Peer-to-peer : les pirates du dimanche rattrapés par la Justice
Philippe Crouzillacq, 01net., le 29/04/2004 à 19h22
Pour la première fois en France, des internautes adeptes du peer-to-peer ont été condamnés à de la prison avec sursis. Certains téléchargeaient à des fins non commerciales des films sur Internet.
Six internautes ont été condamnés jeudi 29 avril par le tribunal correctionnel de Vannes. Il leur était reproché d'avoir piraté, distribué et/ou échangé des contenus culturels (films, jeux vidéo, logiciels, musique) sous forme de CD-Rom et sur Internet. Il s'agit d'un signal fort. Dorénavant, les pirates, même amateurs, ne sont plus à l'abri d'une condamnation au pénal.
Lors d'une perquisition à son domicile, effectuée par les gendarmes du Morbihan, l'un des prévenus avait été pris en flagrant délit de téléchargement illégal d'un film sur Internet. Parmi les six internautes, c'est celui qui a été le plus lourdement condamné. Les peines vont de trois mois de prison avec sursis et dix-huit mois de mise à l'épreuve, à un mois de prison, toujours avec sursis.
Par ailleurs, les personnes condamnées devront rembourser plusieurs milliers d'euros aux parties civiles, qui représentaient les intérêts des industries culturelles. « A ma connaissance c'est une première juridique en France et en Europe , commente Maître Soulie, avocat du Syndicat de l'édition vidéo, de la Fédération nationale des distributeurs de films et de trois producteurs de films américains piratés. Le fait que le tribunal ait attribué les peines les plus sévères aux délits constatés sur les réseaux peer-to-peer, est très significatif. Cela montre que la Justice a compris l'angoisse de l'industrie cinématographique face à la montée de cet inquiétant phénomène. »
L'industrie du cinéma se mobilise
Outre les films téléchargés sur un réseau peer-to-peer, les gendarmes avaient également saisi plusieurs centaines de films piratés (dont Jurassic Park, La Haine, Le Dîner de cons, Pearl Harbor et E.T. l'extraterrestre ...). « C'est ce qui constitue le fond de catalogue d'un vidéo club » , explique Antoine Virenque, délégué général de la Fédération nationale des distributeurs de films.
La justice n'a pas retenu de caractère commercial dans le mode de diffusion des contenus piratés. « Cependant , ponctue Antoine Virenque, quand on retrouve plusieurs DivX du même titre gravés sur CD-Rom, on est en droit de se poser la question. »
Prévenus de cette affaire par l'Alpa ( Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle ), les distributeurs de films s'étaient portés partie civile au procès. « Nous partageons les craintes de nos collègues de l'industrie musicale , poursuit Antoine Virenque, (...) si l'on considère que des sommes colossales sont investies dans la production d'un film, la piraterie est une atteinte très grave à la création cinématographique. »
Quelle parade le monde du cinéma va-t-il adopter face à la recrudescence des actes de piratage ? « Nous allons essayer de sensibiliser de manière pédagogique et humoristique le public qui se déplace dans les salles. Ce qu'a récemment fait UGC à l'occasion de la sortie de Blueberry [ diffuser des fichiers leurres du film sur Internet , NDLR], nous semble aussi une bonne démarche. »
Preuve que la menace se rapproche, les professionnels du cinéma se sont donnés rendez-vous le 11 mai prochain, en ouverture du Festival de Cannes, pour débattre de la lutte contre le piratage audiovisuel.