par Petitgris » 31 Mar 2004, 14:56
Salut St-nitzsky,
Sur les TOE, je suis tombé sur une lettre du téméraire Baruch Spinoza qui revient – on ne peut plus explicitement – sur cette idée :
« Vous me demandez mon opinion sur la façon dont nous pouvons connaître comment chaque partie de la Nature s’accorde avec son tout, et en quelle manière elle se rattache aux autres parties… Pour ce qui est de savoir absolument en quelle manière les choses se lient les unes aux autres, et s’accorde avec leur tout, je n’ai pas cette science. Elle requerrait la connaissance de la Nature entière et de toutes ses parties. Je m’applique en conséquence à démontrer quelle raison m’oblige à affirmer que cet accord et cette liaison existent. »
Amusant de constater comme cette « carence » scientifique est facilement contournée l’aide d’une démonstration qui s’attache à une « raison » qui « oblige à affirmer que…».
C’est assez difficile à lire et à comprendre Spinoza. Ferdinand Alquié qui lui a consacré quelques ouvrages avouait ne pas « comprendre » l’Ethique.
Sur cette irrépressible envie de tout capter et de tout expliquer (voire plus si affinités) sur quelques principes « en béton », on peut aussi rappeler une phrase mémorable de Descartes : « Donnez-moi de la matière et du mouvement et je créerai le monde ». Glissement terrible, un croyant qui se prend pour Dieu le père !
Si ma mémoire est bonne, Hawking s’était plus ou moins permis une sortie aussi pétaradante (quoique plus « réaliste » reconnaissons-le) sur une hypothétique machine à voyager dans le temps (les cordes comme la Relativité permettent théoriquement ces mouvements temporels). Actualisé, ça donnait : « Donnez-moi x milliards de dollars et je construit une machine à voyager dans le temps ».
Je viens de finir « L’aveuglante proximité du réel » (clin d’œil platonicien ou vanne d’épistémologue ?) du fameux Bitbol. Très intéressant. Il arrive à rendre compréhensible certaines arcanes de la mécanique quantique, le style est plutôt plaisant et cette épistémologie de l’ « entre-deux » (lecture empiriste / lecture réaliste) me semble effectivement plutôt stimulante…
Il revient d’ailleurs sur l’erreur de perception de Descartes et de Newton dont « les lois de la nature » « entretiennent un rapport (plus ou moins étroit) avec des nécessités transcendantales, et leur forme intervient comme le soubassement de n’importe quel modèle adéquat des « systèmes du monde ». L’insistance exclusive sur les modèles, au moins sur des modèles non minimaux, est probablement le signe d’une perception déficiente des moments transcendantaux incorporés dans les théories physiques ».
En plus, avec un thème pareil, il s’arrange pour citer Bourdieu, Deleuze, Bouveresse, Jankélévitch et Schopenhauer. Respect.