Source : http://www.sudouest.fr/2013/09/07/la-ou ... 7-5469.php
Pays basque espagnol : reportage dans un Cannabis Social Club
À une semaine d’Expogrow, la grande foire-expo d’Irun dédiée à la marijuana, « Sud Ouest » s’intéresse au phénomène des clubs de consommateurs qui fleurissent outre-Bidassoa. Reportage.
Où le fumeur de marijuana n’aurait qu’à venir retirer sa dose d’herbe hebdomadaire comme on récupère son panier de légumes à l’AMAP (Association pour le maintien de l’agriculture paysanne.) du coin. L’angoisse du pâtisson ou du kilo de blettes en moins. Ce rêve de militant de la dépénalisation est une réalité de l’autre côté des Pyrénées où ce modèle de coopératives de cannabis, fondées sur un principe de circuit court, directement du producteur au consommateur, se développe depuis une vingtaine d’années. On les appelle des Cannabis social club (CSC).
Il en existerait près de 300 en Espagne. 50 rien qu’en Euskadi. Une trentaine d’entre eux localisés autour de Saint-Sébastien. Le vétéran de ces cercles d’amateurs de hachisch se situe dans le cœur de l’élégante capitale, à deux pas de la plaza Buen pastor, de l’autre côté du pont Maria Cristina.
Origine basque certifiée
Les bureaux de Ganjazz occupent l’entresol d’un immeuble moderne. C’est ici que les 350 adhérents de l’association viennent s’approvisionner en cannabis. Origine basque certifiée. L’herbe pousse à quelques kilomètres de là, entre plants de tomates, pimiento de Padrón, fraises et haricots blancs. « La marijuana ne représente que 10 % de ce que nous cultivons au sein de la coopérative agricole. » Soit une production annuelle de 50 kg de cannabis, assure Iker Val, le coordinateur du club né en 2001.
« Ici, ce n’est que la partie ‘‘service’’ où l’on accompagne et conseille nos socios sur le choix des variétés d’herbe », renseigne le taulier à l’allure d’éternel adolescent. Le local est spacieux, aseptisé. Dans l’air flotte une odeur subtile de cannabis séché. Mais pas question de s’en griller un ici. « Nous sommes sous le coup de la loi sur l’interdiction de fumer dans les lieux d’usage collectif. Et puis nous avons des salariés, cela pourrait affecter leur santé », justifie sans un brin d’ironie le trentenaire, démarche souple, discours carré.
Le code de bonnes conduites établit par Eusfac, la fédération qui regroupe les CSC du Pays basque espagnol, est clair : pas de fumette près des locaux, pas de rassemblement, ni de parking en double file. Pour ne pas choquer le voisinage, l’association a mis en place un fumoir du côté de Lasarte, à une dizaine de kilomètres de Saint-Sébastien. Un espace réservé aux socios que curieux - et journalistes - sont priés laisser consommer en paix.
Ne pas faire de vague
Le jeune gérant, qui dirige aussi la fédération, ne souhaite pas faire de vague sur l’Urumea. Derrière son comptoir, il mesure (au gramme près) chacune de ses paroles.
« Ici, il n’y a pas de client. On ne vend pas. Sinon ce serait considéré comme du trafic de drogue. » Les adhérents s’acquittent chaque année d’une cotisation de 50 euros. Leur « apport » à la coopérative est ensuite calculé en fonction de leur consommation.
Sans révéler les tarifs pratiqués par son club, le coordinateur parle d’un budget moyen de 1 000 euros annuel par socio. « Il n’y a aucun bénéfice. Nos comptes sont transparents. Nous versons des impôts au gouvernement. L’argent qui reste sert à payer les 10 salariés de la coopérative et à financer l’entretien des locaux et de l’exploitation », insiste-t-il. La formule aurait de quoi attirer le fumeur français, condamné à la clandestinité, mais Iker Val préfère couper la tête aux faux espoirs. « Pour adhérer à Ganjazz, il faut être parrainé par un membre de l’association (qui peut parrainer une personne par an), avoir plus de 21 ans et être domicilié à Saint-Sébastien. »