http://www.huffingtonpost.fr/2013/03/30 ... 85194.html Un premier "cannabis social club" reconnu officiellement en Vendée
Le HuffPost | Par Stanislas Kraland Publication: 30/03/2013 20:08 CET | Mis à jour: 30/03/2013 21:25 CET
CANNABIS - C'est une première en France. Cette semaine, la Préfecture de Vendée a officiellement accepté la création d'un "cannabis social club" (CSC), en accusant réception d'un dossier monté par cinq personnes. Vendredi 29 mars, ces derniers ont reçu le papier d'attestation officielle avec leur numéro d'association.
Les cannabis social clubs, dans lesquels les membres cultivent du cannabis et partagent leur production sans en faire commerce, existent déjà en Espagne et en Belgique. Mais sont totalement illégaux en France. Ses partisans expliquent vouloir contrecarrer les trafics et mieux contrôler la qualité du produit pour protéger les consommateurs.
La reconnaissance de ce premier club par une Préfecture est donc une étape importante pour leurs défenseurs. Il reste toutefois au cannabis social club vendéen à accomplir une formalité administrative, qui vise à voir sa déclaration, son siège social et son objet publiés au Journal Officiel des associations. Cette publication doit intervenir dans les 30 jours.
Ce qui est presque sûr, c'est que ce virage amorce le début de la guerre avec l'Etat et les différents acteurs concernés. Le conseil général de Vendée a ainsi déjà décidé de saisir le procureur de la République sur l'officialisation de ce premier club. L'institution attend du procureur "qu’il fasse respecter la loi et qu’il mette à l’abri les jeunes Vendéens du fléau de la drogue".
Il y a deux semaines, un pas en avant important avait été accompli pour le "mouvement". Dominique Broc, le porte-parole du "Cannabis social club de France", avait lui aussi réussi à faire valider par la préfecture d'Indre-et-Loire les statuts de son club. Mais à la différence du club vendéen, le "Cannabis social club de France", n'avait pas vocation à cultiver et produire de l'herbe, mais plutôt à fédérer l'ensemble des autres clubs qui devraient bientôt voir le jour.
Le réveil du "peuple de l'herbe"
A l'heure actuelle, le territoire compte plusieurs centaines de cannabis social clubs. Et depuis que le "Cannabis social club français" a fait connaître son désir de rentrer dans la légalité en décembre 2012, des dizaines de nouveaux membres se manifestent chaque jour par email mais aussi sur la page Facebook de Dominique Broc.
Sur cette même page, nombre de "fumeurs responsables" sont même allés jusqu'à publier une "carte verte" reproduisant leur nom, leur prénom et leur âge.
cannabis
Des données d'ordre privé dont la publication vise à revendiquer le droit à fumer. "Au total, le document qui sert de base à cette carte verte a été téléchargé plus de 22.600 fois", se félicite Dominique Broc. Un générateur automatique devrait être prochainement mis en ligne.
Quant aux "non-fumeurs", ils peuvent eux aussi rendre public leur soutien grâce à une carte blanche. Autant de témoignages rassemblés par le cannabis social club français pour attester du soutien de son initiative au sein de la population.
"Le peuple de l'herbe se réveille", se réjouit Dominique Broc. "Après le printemps arabe, nous assisterons peut-être cette année à un printemps vert", espère-t-il. Un rêve qui pourrait devenir réalité si l'ensemble des cannabis social clubs de France parviennent eux aussi à se déclarer en association en préfecture. "425 clubs se tiennent prêts", assure Dominique Broc. Au total, ce sont près de 700 cannabis social clubs qui pourraient même être amenés à se déclarer." À travers ce geste, on demande au gouvernement de trancher," explique Dominique Broc.
Cette déclaration massive, qui a concerné l'ensemble du territoire, a eu lieu lundi 25 mars. Finalement, entre 15 et 20 cannabis social clubs seulement se sont officiellement déclarés dans plusieurs préfectures.
L'État invisible jusque-là
Même si la situation devrait changer désormais avec la reconnaissance de ce premier CSC en Vendée, qu'a fait l'Etat pendant ce temps-là? Rien ou presque. Seul l'initiateur du mouvement, Dominique Broc, a été interpellé et mis en examen le 21 février. "On est remonté à bloc, mon arrestation a contribué à renforcer nos troupes", explique-t-il, malgré la saisie de sa production par les forces de l'ordre. Et si l'avenir ne lui fait pas peur, c'est parce qu'en cas de problème, ces apôtres de la désobéissance civile ont prévu de mettre en œuvre tous les moyens possibles pour mettre des bâtons dans les roues des autorités, quittes à revendiquer l'illégalité de leurs pratiques.
Les cannabis social clubs s'appuient sur une décision cadre de l'Union européenne datant d'octobre 2004. Si celle-ci affirme que "les États membres garantissent que la culture de plantes de cannabis, effectuée illégalement, est un délit punissable", son article 2.2 indique que "ne sont pas inclus dans le champ d’application de la présente décision-cadre lorsque leurs auteurs s'y livrent exclusivement à des fins de consommation personnelle telle que définie par la législation nationale."
En d'autres termes, pour l'Europe, les cannabis social clubs sont légaux et n'entrent pas dans le cadre du trafic de drogues.
Quant aux fumeurs responsables des cannabis social clubs, ils se sont d'ores-et-déjà donnés rendez-vous au tribunal correctionnel de Tours le 8 avril prochain. Objectif: soutenir Dominique Broc lors de l'écoute de son verdict, comme pour mieux affirmer leur détermination:
L'UMP se positionne pour la première fois
Bruno Beschizza, secrétaire national de l'UMP, s'est exprimé dans un message publié sur le site de l'UMP: "(Je dénonce) les mensonges du gouvernement qui, derrière les postures du ministre de l'Intérieur et (...) (de) François Hollande, prépare dans les faits les esprits à la dépénalisation du cannabis. Cette permissivité trouve donc aujourd'hui un cadre légal permettant finalement de mettre en application une idéologie soixante-huitarde ouvrant les portes demain à la dépénalisation voire la légalisation des stupéfiants au prix bien entendu des ravages causés en terme de sécurité et santé publiques."
» Le récépissé et les fameuses cartes vertes :
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Le récépissé de déclaration
Mosaïque de certes vertes
Capture d'écran de la page Facebook de Dominique Broc
Plus de "cartes vertes"
Capture d'écran de la page Facebook de Dominique Broc
» Le cannabis, pour ou contre ?
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Faut-il mettre fin à la guerre contre le cannabis? Retrouvez les cinq raisons invoquées par les partisans d'une dépénalisation, voire de la légalisation du cannabis en France et les cinq arguments de leurs adversaires.
POUR: parce que la répression n'empêche pas la consommation
Les partisans de la légalisation jugent que la répression de la consommation et de la vente du cannabis a clairement échoué: entre 2007 et 2011, les usages déclarés de cannabis des jeunes Français ont fortement augmenté de 15 % à 24 %, selon des chiffres de l'OFDT. Selon Michel Gandilhon (OFDT), il y aurait entre 100.000 et 200.000 cannabiculteurs en France qui cultivent souvent pour leur propre consommation. La France produirait 30 tonnes d'herbe de cannabis par an.
CONTRE: parce que le cannabis reste une drogue
S'il n'existe pas de cas de mort par overdose de cannabis, sa consommation peut entraîner des troubles psychiques, anxieux ou dépressifs. La légalisation du cannabis reviendrait à encourager le syndrome dit "amotivationnel", état d'apathie dans lequel le consommateur de cannabis peut être plongé.
POUR: parce que fumer à des vertus thérapeutiques
L'usage de la marijuana à des fins médicales remonte à l'Egypte ancienne. Autorisé dans plusieurs pays ou Etats, dont la Californie, il serait efficace pour lutter contre l'épilepsie et les effets secondaires des traitements cancéreux (nausées, vomissements). Le cannabis a également des propriétés anti-douleur.
CONTRE: parce que fumer au volant est mortel
Les conducteurs sous influence du cannabis ont 1,8 fois plus de risques d’être responsables d’un accident mortel que les conducteurs négatifs (ce sur-risque est de 15 en cas de consommation conjointe d’alcool). Sur une base de 6 000 accidents mortels, le nombre annuel de victimes lié à une conduite sous l’emprise de cannabis serait de 230 décès, selon l'OFDT.
POUR: afin de court-circuiter les dealers
Réguler la consommation et la vente de cannabis permettrait de couper l'herbe sous le pied des quelques 100.000 petits dealers recensés en France, selon les chiffres de Christian Ben Lakhdar, économiste des drogues à l'Université catholique de Lille. Ces dealers gagneraient entre 4.500 et 10.000 euros par an. Le chiffre d'affaires annuel du trafic est estimé entre 700 millions et un milliard d'euros. Mais ses opposants rappellent que légaliser un marché ne fait pas disparaître les trafics pour autant, comme le montre le boom des cigarettes de contrebande.
CONTRE: parce que légaliser doperait le trafic de drogues dures
C'est un des arguments massue des détracteurs d'une légalisation du cannabis: les consommateurs de cannabis évolueraient plus facilement vers la consommation de drogues dures. La théorie dite "de la porte d'entrée" n'a toutefois jamais été prouvée scientifiquement, les déterminants de la toxicomanie étant à une immense majorité sociaux ou familiaux.
POUR: afin de garantir la qualité du produit
La légalisation permettrait de mieux contrôler la qualité des produits distribués en France, voire d'imposer une baisse du taux de THC (la propriété active du cannabis). C'est la position que défend Daniel Vaillant, ancien ministre de l'Intérieur socialiste.
CONTRE: parce que les Français n'en veulent pas
L'opinion a toujours été hostile au principe de la dépénalisation. <a href="http://www.ifop.com/?option=com_publication&type=poll&id=1906">Selon un sondage Ifop réalisé en juin dernier</a>, 70% des Français sont hostiles à la dépénalisation du cannabis. 67 % étaient contre en 1996 et 66 % en mars 2002. Si l’adhésion à la légalisation est plus répandue chez les jeunes, elle y demeure néanmoins minoritaire. En revanche, , les trois quarts des Français se disaient favorables à l’usage thérapeutique du cannabis en 2002.
POUR: parce que l'Etat y gagnerait financièrement
Selon l’économiste Pierre Kopp, professeur à l’université Paris-I, une légalisation du cannabis, avec une taxe fixée par l’Etat comme pour le tabac, rapporterait 1 milliard d’euros à la collectivité. Par ailleurs, le coût social d'une interpellation pour usage de cannabis est estimé à 3.300 euros (temps de travail des policiers, procédures, etc.). Tant et si bien que la dépénalisation pourrait faire économiser "300 à 400 millions d’euros par an", selon Christian ben Lakhdar. Autant d'argent qui pourrait être réorienté vers la prévention.
CONTRE: Le contre-exemple des Pays-Bas
Les expériences étrangères en matière de dépénalisation n'ont pas apporté la preuve qu'elles étaient une solution miracle contre la drogue. <a href="http://www.drogues.gouv.fr/actualitespresse/decryptage/depenalisation-legalisation/">Selon la Mildt (Mission interministérielle de lutte contre la drogue)</a>, les Pays-Bas, face aux limites de leur politique dite "de tolérance" en matière de cannabis, ont annoncé un durcissement de leur législation et prévoient de restreindre drastiquement l'accès aux coffee-shops en les transformant en clubs privés réservés aux seuls résidents réguliers.