S'il s'était agi de deux Français trafiquants de cannabis ..
Posté: 07 Mar 2005, 18:48
Le Raid s'entraîne sur des Tchétchènes
Descente musclée à Orléans, pour arrêter deux frères soupçonnés d'une simple agression.
Par Mourad GUICHARD
lundi 07 mars 2005 (Liberation - 06:00)
Orléans correspondance
l est 6 heures du matin, ce mardi 15 février, lorsque les hommes du Raid (1), l'unité d'élite de la police, pénètrent dans un immeuble d'une rue d'Orléans. Leur cible ? Deux frères tchétchènes soupçonnés d'une agression physique sur un Russe, quelques mois plus tôt, dans l'Essonne. «Je dormais dans le salon quand j'ai été réveillé par le premier coup de feu. Alors, j'ai vu ces hommes encagoulés, fusil d'assaut et lampe torche en main», raconte Timor, 26 ans, qui était resté dormir chez ses amis. «Ils nous ont plaqués au sol et menottés. Ensuite, ils ont fouillé l'appartement en demandant si nous avions des armes ou des explosifs, poursuit-il. Puis des policiers nous ont pris en photo. Avant de partir, ils ont emporté nos téléphones, des albums de photos de famille et quelques papiers. La traductrice nous a juste dit que nos deux amis seraient de retour sous 48 heures.» L'opération a duré deux heures.
Il a fallu une semaine pour que les proches des deux hommes aient des informations sur leur sort. «Nous avons finalement appris que l'un des deux frères était incarcéré à Fleury-Mérogis, l'autre à Fresnes», explique Nathalie, une amie. Les deux Tchétchènes ne parlant pas français, les démarches administratives sont compliquées. «Pour qu'ils puissent avoir un avocat, ils doivent en faire la demande par écrit. Si personne ne les aide, la situation me semble inextricable», reconnaît une avocate parisienne.
Dentiste et instituteur. Les moyens déployés pour cette arrestation ont provoqué un vif émoi dans le quartier. «C'est un endroit très cosmopolite. Ici cohabitent des Turcs, des Congolais ou des Tchétchènes. Je pense que de telles méthodes jettent un grave discrédit sur une communauté tout entière», reprend Nathalie. Le profil des deux frères ne semblait pas, non plus, justifier ce déploiement : «Ils sont arrivés en France en janvier 2004. L'un était dentiste, et l'autre instituteur à Grozny. Le plus grand, âgé de 26 ans, doit se marier le 26 mars. Ils suivaient une formation qualifiante et répondaient aux convocations de l'ANPE. Je ne comprends pas pourquoi, si besoin était, ils ne les ont pas interpellés à la sortie d'un supermarché, par exemple.»
«Aucune suite». La direction départementale de la sûreté publique (DDSP) de l'Essonne assure «ne pas être à l'origine de la saisine du Raid» et rappelle que «toutes les interventions du Raid sont liées à des menaces terroristes, aux faits de grand banditisme ou à des prises d'otages». Le chef de la DDSP du Loiret indique par ailleurs n'avoir été informé que quelques jours avant l'opération : «Une fois prévenus, nous envoyons un inspecteur qui suit le déroulement des opérations dans l'hypothèse où les faits intéresseraient nos services. Dans ce cas, nous n'avons donné aucune suite.» Chacun se renvoie donc la responsabilité. «Le mot tchétchène fait peur. Ils ont peut-être envoyé le Raid par précaution», tente d'expliquer un commandant de la DDSP de l'Essonne.
La réponse officielle est venue de la bouche même de Jean-Paul Fiamenghi, le responsable du Raid : «Nos hommes sont mis à disposition de la Direction générale de la police nationale (DGPN) pour des interventions basiques. Nous vivons cela comme un entraînement entre deux missions lourdes.» Un entraînement pas si anodin, puisque, pour pénétrer dans l'appartement des deux frères, situé au premier étage, les policiers ont explosé la serrure de la porte à l'aide de leurs fusils. Deux autres impacts de balles ont été retrouvés, l'un dans le mur de la salle de bain et l'autre dans celui de la chambre. Heureusement, personne ne se trouvait derrière. «Sous le coup de la première déflagration, les vitres ont volé en éclats», se souvient Timor. Le chef du Raid se veut clair sur cette opération : «Le fait que les deux individus soient d'origine tchétchène n'entre pas en ligne de compte. S'il s'était agi de deux Français trafiquants de cannabis, l'opération se serait déroulée de la même façon.»
(1) Recherche Assistance Intervention Dissuasion.
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Descente musclée à Orléans, pour arrêter deux frères soupçonnés d'une simple agression.
Par Mourad GUICHARD
lundi 07 mars 2005 (Liberation - 06:00)
Orléans correspondance
l est 6 heures du matin, ce mardi 15 février, lorsque les hommes du Raid (1), l'unité d'élite de la police, pénètrent dans un immeuble d'une rue d'Orléans. Leur cible ? Deux frères tchétchènes soupçonnés d'une agression physique sur un Russe, quelques mois plus tôt, dans l'Essonne. «Je dormais dans le salon quand j'ai été réveillé par le premier coup de feu. Alors, j'ai vu ces hommes encagoulés, fusil d'assaut et lampe torche en main», raconte Timor, 26 ans, qui était resté dormir chez ses amis. «Ils nous ont plaqués au sol et menottés. Ensuite, ils ont fouillé l'appartement en demandant si nous avions des armes ou des explosifs, poursuit-il. Puis des policiers nous ont pris en photo. Avant de partir, ils ont emporté nos téléphones, des albums de photos de famille et quelques papiers. La traductrice nous a juste dit que nos deux amis seraient de retour sous 48 heures.» L'opération a duré deux heures.
Il a fallu une semaine pour que les proches des deux hommes aient des informations sur leur sort. «Nous avons finalement appris que l'un des deux frères était incarcéré à Fleury-Mérogis, l'autre à Fresnes», explique Nathalie, une amie. Les deux Tchétchènes ne parlant pas français, les démarches administratives sont compliquées. «Pour qu'ils puissent avoir un avocat, ils doivent en faire la demande par écrit. Si personne ne les aide, la situation me semble inextricable», reconnaît une avocate parisienne.
Dentiste et instituteur. Les moyens déployés pour cette arrestation ont provoqué un vif émoi dans le quartier. «C'est un endroit très cosmopolite. Ici cohabitent des Turcs, des Congolais ou des Tchétchènes. Je pense que de telles méthodes jettent un grave discrédit sur une communauté tout entière», reprend Nathalie. Le profil des deux frères ne semblait pas, non plus, justifier ce déploiement : «Ils sont arrivés en France en janvier 2004. L'un était dentiste, et l'autre instituteur à Grozny. Le plus grand, âgé de 26 ans, doit se marier le 26 mars. Ils suivaient une formation qualifiante et répondaient aux convocations de l'ANPE. Je ne comprends pas pourquoi, si besoin était, ils ne les ont pas interpellés à la sortie d'un supermarché, par exemple.»
«Aucune suite». La direction départementale de la sûreté publique (DDSP) de l'Essonne assure «ne pas être à l'origine de la saisine du Raid» et rappelle que «toutes les interventions du Raid sont liées à des menaces terroristes, aux faits de grand banditisme ou à des prises d'otages». Le chef de la DDSP du Loiret indique par ailleurs n'avoir été informé que quelques jours avant l'opération : «Une fois prévenus, nous envoyons un inspecteur qui suit le déroulement des opérations dans l'hypothèse où les faits intéresseraient nos services. Dans ce cas, nous n'avons donné aucune suite.» Chacun se renvoie donc la responsabilité. «Le mot tchétchène fait peur. Ils ont peut-être envoyé le Raid par précaution», tente d'expliquer un commandant de la DDSP de l'Essonne.
La réponse officielle est venue de la bouche même de Jean-Paul Fiamenghi, le responsable du Raid : «Nos hommes sont mis à disposition de la Direction générale de la police nationale (DGPN) pour des interventions basiques. Nous vivons cela comme un entraînement entre deux missions lourdes.» Un entraînement pas si anodin, puisque, pour pénétrer dans l'appartement des deux frères, situé au premier étage, les policiers ont explosé la serrure de la porte à l'aide de leurs fusils. Deux autres impacts de balles ont été retrouvés, l'un dans le mur de la salle de bain et l'autre dans celui de la chambre. Heureusement, personne ne se trouvait derrière. «Sous le coup de la première déflagration, les vitres ont volé en éclats», se souvient Timor. Le chef du Raid se veut clair sur cette opération : «Le fait que les deux individus soient d'origine tchétchène n'entre pas en ligne de compte. S'il s'était agi de deux Français trafiquants de cannabis, l'opération se serait déroulée de la même façon.»
(1) Recherche Assistance Intervention Dissuasion.
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