Suicide chez les jeunes: les anti-dépresseurs au banc des accusés
[15/09 - 22h30] http://actu.dna.fr/040915203001.u1uclr54.html
Après l'Europe, les anti-dépresseurs sont au banc des accusés aux Etats-Unis
où les autorités médicales ont reconnu qu'ils présentent des risques accrus
de suicide chez les jeunes, conduisant des experts à recommander de fortes
mises en garde pour les médecins et patients.
"Je pense que nous croyons tous maintenant qu'il y a un accroissement des
tendances au suicide avec la prise de ces anti-dépresseurs", avait déclaré
en début de semaine le docteur Robert Temple, un haut responsable de
l'administration chargé du contrôle alimentaire et pharmaceutique (FDA).
Il résumait les conclusions d'un groupe de 31 experts ayant analysé les
résultats des essais cliniques conduits sur 4.000 enfants et adolescents par
les laboratoires pharmaceutiques produisant les cinq anti-dépresseurs
autorisés aux Etats-Unis pour les moins de dix-huit ans dont le Prozac et le
Zoloft.
Cette série de tests a indiqué qu'un jeune prenant ces médicaments avait en
moyenne deux fois plus de risque d'avoir des pensées suicidaires que celui
qui avait pris un placebo.
Pour le Prozac, l'anti-dépresseur le plus prescrit pour traiter la
dépression chez les jeunes, ce risque est 50% plus élevé, selon cette étude.
Aucun suicide n'a eu lieu parmi les jeunes testés avec des anti-dépresseurs,
a précisé la FDA.
Les conclusions de ces essais cliniques ont été jugées suffisamment
alarmantes par le comité consultatif d'experts de la FDA qui s'est prononcé
mardi soir à une forte majorité pour imposer l'avertissement le plus sévère
possible (bordé de noir) sur les fiches d'informations des anti-dépresseurs
fournies aux médecins par les laboratoires pharmaceutiques.
Le comité a aussi estimé que ces laboratoires devraient fournir une notice
destinée aux patients expliquant en termes simples les dangers potentiels
liés à la prise de ces médicaments.
La FDA devrait probablement entériner ces recommandations dans les prochains
mois, comme cela est très souvent le cas.
Si des centaines de médicaments sont accompagnés d'un avertissement bordé de
noir, la FDA n'a imposé des notices destinées à avertir les patients des
risques potentiels que pour une trentaine de traitements.
La FDA avait déjà imposé en mars dernier une modification des étiquettes sur
dix anti-dépresseurs, pour mentionner la nécessité d'un suivi particulier et
de détecter des signes de dépression accrue chez certain, particulièrement
chez les jeunes.
L'agence fédérale avait pris cette décision après qu'un de ces experts eut
déjà conclu en février à l'existence de risques potentiels de suicide chez
les enfants et adolescents traités avec les cinq anti-dépressifs ayant fait
l'objet d'essais cliniques par les fabricants. Mais la FDA ne l'avait pas
alors autorisé à présenter son rapport car elle jugeait ses conclusions
prématurées.
Si les experts de la FDA se sont accordé pour imposer les avertissements,
aucun d'eux n'a demandé l'interdiction de ces médicaments, comme ce fut le
cas dans plusieurs pays européens dont la Grande-Bretagne à la fin de 2003.
Toutefois des médecins ont estimé souhaitable que l'usage des
anti-dépresseurs chez les jeunes diminue dans la mesure où non seulement ils
présentent des risques mais leur efficacité est douteuse.
"Nous disposons de très bonnes indications de leurs effets néfastes et très
peu de leur efficacité", a expliqué le Dr. Thomas Newman un professeur de
pédiatrie, cité dans le New York Times.
Selon les dernières statistiques disponibles, les médecins américains ont
rédigé près de 11 millions d'ordonnances pour des anti-dépresseurs destinés
à des moins de dix-huit ans en 2002, soit 8% du total de ces médicaments
prescrits aux Etats-Unis.