PARIS (AFP) - Bien qu'officiellement autorisée depuis mardi aux Pays-Bas - après la Belgique et le Canada - la délivrance de cannabis pour soulager les personnes souffrant de maladies lourdes ou incurables est encore loin d'avoir fait la preuve de son efficacité.
Au Canada et aux Etats-Unis - leaders en ce domaine - une forme orale du principe le plus connu du cannabis, le THC, est synthétisée et commercialisée, sous différents dosages, sous le nom de Marinol.
Ce médicament est indiqué pour le traitement des vomissements liés aux chimiothérapies et pour stimuler l'appétit en cas d'anorexies.
Pour autant, le ministère canadien de la Santé, qui a passé en revue toutes les études et toutes les vertus prêtées au produit, estime que "les études scientifiques tentant d'appuyer la sécurité et l'efficacité de la marijuana (autre nom du cannabis) à des fins thérapeutiques ne sont pas concluantes", notamment en raison du tout petit nombre de patients ayant participé aux essais.
"Dans certaines études, écrit le ministère, les cannabinoïdes ont été d'une efficacité égale aux anciens antiémétiques (anti-vomissements), mais dans certains autres, ils se sont révélés moins efficaces".
"Cependant, les principales limitations, même pour un usage court, sont les effets secondaires éventuellement sérieux comme la dépression, la paranoïa et les hallucinations", ajoute le rapport.
Les experts canadiens constatent toutefois que plus les patients sont jeunes, mieux le produit est accepté. Et que les patients plus âgés seraient moins tolérants au "high", l'effet euphorisant provoqué par la marijuana.
Selon l'Académie américaine des Sciences, les effets des cannabinoïdes fumés seraient "prometteurs" pour lutter contre la dénutrition observée chez certains malades du sida. Des perspectives qui sont toutefois jugées "anecdotiques" par les Canadiens, pour qui le cannabis oral, le Marinol - seul médicament "au cannabis" disponible au monde - est approuvé pour cette indication.
Pour stimuler l'appétit et engendrer un gain de poids chez les patients cancéreux, la marijuana n'a tout simplement pas été étudiée.
Pour l'anorexie mentale, une autre maladie entraînant une perte de poids parfois mortelle, une seule étude, avec du cannabis oral, a été menée, sans résultat probant, mais avec des effets secondaires graves.
Plusieurs rapports "anecdotiques" existent selon lesquels la marijuana peut améliorer l'hypertonie associée à la sclérose en plaques ou au traumatisme médullaire, relève encore le ministère canadien de la Santé.
D'autres études ont été menées notamment sur l'épilepsie, la maladie de Huntington, de Parkinson, le syndrome de la Tourette (tics persistants) et le glaucome.
Mais elles ont été soit peu concluantes, soit assorties - comme dans le cas du glaucome - d'effets secondaires graves. Si les douleurs oculaires ont été peu ou prou soulagées, elles se sont trouvées accompagnées d'hypotension, de palpitations et d'effets psychotropes "inacceptables".
Dans le cas de la maladie d'Alzheimer, le médicament au cannabis a donné quelques résultats, mais, souligne le Canada, la cigarette à la marijuana pourrait avoir des effets pires que le mal, en raison des dangers d'incendie que pourraient provoquer des cigarettes mal éteintes ou oubliées par ces patients sans mémoire...