- Réunion MILDT du 1er septembre 2003 -
Objet : Réforme de la loi de santé publique chapitre « toxicomanie » et réforme de la loi de 1970
Présents :
Associatifs :
Coppel, JM. Priez (techno Plus), D’allasandro Ugo, Thierry M’baye (Spiriteck), V. Pelletier, M. Bourrely (AIDES), E. Matter (ASUD), V. Rogissart (Médecins Du Monde)
MILDT :
D. Jayle, Président, P. Poloméni, O. Middleton, chargés de mission
Cette réunion fait suite à une première rencontre qui a eu lieu en juillet 2003 pour informer les associations des travaux engagés pour réformer la loi de 1970 relative aux stupéfiants. Ces travaux passaient notamment par la consultation des associations et des différents ministères concernés. Nous étions donc ici invités par D. Jayle et ses collaborateurs pour un premier retour des consultations engagées sur l’été avant la remise du rapport de la MILDT au premier ministre en date du 15 septembre comme annoncé en juillet.
Les réformes envisagées concernent deux lois :
- la loi de santé publique dans son volet « toxicomanie »
- la loi dite de 70
Pour la loi de santé publique qui pourraient être discutée en octobre 2003 au parlement, D J nous informe qu’il y a consensus pour que la réduction des risques (RDR) soit inscrite dans la loi. C’est, nous rappelle t-il, l’engagement pris par JF Mattei, ministre de la santé, lors des assises 2003 de AIDES. Cela pourrait prendre la forme d’une définition de la RDR, d’une description de ce que cela recouvre, de dispositions qui permettent de protéger les acteurs sur les notions de « provocation à usage » notamment. La question de procédure d’agrément a été évoquée mais il semble que ce soit la notion de référentiel qui soit retenu comme cadre de pratique des acteurs de la RDR. La RDR est ici envisagée comme un outil de protection des maladies et des dommages.
Pour la loi de 70 qui pourrait être discutée au printemps 2004, D J nous explique qu’il souhaite que cette loi de 70, qu’il considère avant tout être une loi de soin qui a tenté d’articuler justice et santé, devienne une loi de prévention centrée sur les mineurs principalement. Cela pourrait générer des structures inspirées du modèle des CDAG qui puissent être des lieux d’accueil, d’écoute, d’accompagnement, d’évaluation des consommations, d’alternative à l’injonction thérapeutique qui n’a pas de sens pour de simples usagers. C’est un premier axe.
La loi contiendrait par ailleurs un axe sur les consommations problématiques.
Sur l’axe répressif, s’il semble qu’il y ait consensus pour ne plus incarcérer les usagers, le postulat du maintien de l’interdit reste largement dominant.
C’est à partir de là que les consommations de drogues passeraient du délit à la contreventionnalisation. L’hypothèse retenue serait celle d’une contravention de classe 5 avec inscription au casier judiciaire (n°1) qui ne serait consultable que par les services de police et donc à l’exclusion des employeurs par exemple...
Cette contravention de classe 5 s’élève à un montant maximum de 1500 euros. Des peines de substitution ou alternative aux poursuites pourraient être prise soit en audience soit par ordonnance pénale.
D J nous informe qu’il a par ailleurs demandé une étude comparative des différents droits européens en la matière à l’OEDT .
Pour conclure D J nous explique qu’il y a donc un consensus interministériel pour que l’action de santé publique en matière de drogues allie « prévention – soins – réduction des risques ». Il nous indique que l’inscription de la RDR dans la loi de santé publique relève des compétences de la DGS et nous invite à faire part de nos propositions (agrément ou référentiel, formation...) à nos interlocuteurs du ministère de la santé. Il y a pour lui l’affirmation du rôle de l’état dans la prévention et une occasion d’évolution sur des points qui peuvent déboucher sur des avancées. Pour autant, la levée des sanctions des consommations n’est pas d’actualité dans les projets du gouvernement si l’on s’en tient aux consultations de l’été.
Commentaires :
Sans pouvoir relater ici toutes les remarques faites par les personnes présentes, les points suivants ont été soulevés :
L’inscription de la RDR dans la loi de santé publique semble a priori une bonne chose. Reste à savoir quelle définition va y être apporté puisque c’est à partir de là que le reste se déclinera. Reste aussi à définir les moyens et les déclinaisons concrètes à envisagées dans le cadre des décrets d’application pour que cette inscription ne reste pas lettre morte.
Toujours en terme de définition on voit encore ici accoler les termes « prévention – soins – réduction des risques » qui montre une définition étroite de la RDR et le flou conceptuel qui perdure en ce qui concerne la RDR. La RDR ne se décline t-elle pas en termes de soins et de « prévention » si tant est que ce dernier terme soit adapté ? S’agit-il donc d’une stratégie limitée aux maladies infectieuses, d’une stratégie élargie aux consommations de drogues problématique, ou d’une autre façon d’envisager la gestion des drogues dans tous ces aspects, ou encore d’envisager la santé publique elle-même ? Dans ce sens les actions menées par AIDES par exemple auprès de la communauté gay, ou des travailleurs du sexe répondent aux principes de la réduction des risques sans que la question des drogues soit centrale.
Sur les aspects répressifs, évidement, plusieurs questions sont soulevées. Le passage du délit à la contravention est peut-être un progrès, mais cela ne change rien au fond sur la pénalisation des usages qui reste considéré comme un obstacle aux actions de santé. Par ailleurs si des alternatives aux poursuites sont envisagées, cela ne règle rien sur l’inégalité de traitement des affaires en fonction des tribunaux qui, comme l’ont largement démontré les trois dernières décennies, n’appliquent absolument pas de la même façon les mêmes dispositions législatives. Nous n’avons par ailleurs pas évoqué la question de la récidive.
Au-delà de la question des sanctions du simple usage, a été posé le problème des autres incriminations possibles telles que le transport, la possession, actes préparatoires etc..., rappelant que dans les pratiques policières et judiciaires, c’est par l’empilement des différentes « infractions » que se retrouvent condamnés beaucoup d’usagers. S’il nous est précisé que ces aspects seront pris en compte, nous ne savons pas comment.
Nous posons par ailleurs le problème de la sanction d’acteurs de la réduction des risques au motif de provocation ou de favoriser l’usage comme l’affaire de Techno Plus nous le montre actuellement. La loi doit pouvoir garantir et protéger l’action les dits acteurs pour qu’ils ne puissent plus être incriminés dans le cadre qui sera défini, d’où l’importance de la définition du cadre en question.
La priorité sur la prévention à l’égard des mineurs se justifie sans doute en terme de santé publique, mais quant est-il pour les majeurs mis à part pour les consommateurs problématiques qu’ils ne sont pas tous ?
Par ailleurs les dispositifs envisagés pour l’accueil des jeunes et des parents inspirés de la philosophie qui a guidé la mise en place des CDAG viendraient-ils en substitution des « points écoute jeunes » ou « écoute parents » existants ?
D J nous a informé de la sortie de l’enquête comparative des droits européens faite par l’OEDT et nous demandons si le document sera publié ou diffusé. Si l’OFDT ne publie pas ce document, DJ nous le fera parvenir.
Nous avions demandé en juillet si la remise du rapport à remettre au premier ministre au 15 septembre ferait l’objet d’une communication publique. DJ nous confirme que l’initiative ne lui revient pas et que nous devons pour cela saisir Matignon pour connaître les dispositions envisagées sur ce point.
Compte rendu rédigé par V. Rogissart le 03 septembre 2003
Note aux lecteurs :
Ce compte rendu est rédigé à chaud et n’a pas été validé par les participants à cette réunion pour favoriser une diffusion rapide, et je les invite bien entendu à réagir pour compléter ou préciser ce CR. Comme d’habitude je vous laisse l‘initiative de la diffuser auprès des personnes qui vous semblent devoir être informées