"Taking Off", un film à ne rater sous aucun prétex
Posté: 12 Juil 2010, 22:14
Salut à tou(te)s !
Film à voir absolument, notamment pour la scène d’anthologie très réaliste de parents d’enfants fugueurs qui s’essayent au cannabis pour “comprendre” leurs jeunes...
Le titre est un jeu de mots : “Taking Off” signifie “décoller”, mais aussi “déshabiller” (qu'il s'agisse des jeunes hippies ou des parents défoncés jouant au strip-poker).
(je voulais mettre un peu ce texte en forme mais que c'est merdique ! rien ne marche).
http://carlottavod.com/film-305-taking-off.html
"Taking off”, film de Milos Forman (1971)
Une brillante satire sociale par l’auteur de Hair
Sortie en salles le 14 juillet 2010.
Copies neuves.
Festival de Cannes 1971
Grand prix spécial du jury
Synopsis
Larry Tyne traverse une crise de la quarantaine bien canalisée par son psy, et son épouse Lynn joue parfaitement son rôle de femme au foyer de la moyenne bourgeoisie newyorkaise. À plusieurs reprises, leur fille Jeannie fugue pour rejoindre un groupe de jeunes gens rassemblés autour d’idéaux alternatifs tels que la folk music, la libération sexuelle et les drogues douces. Lorsque Larry part retrouver sa trace à travers Manhattan, il découvre toute une population déviante, fait l’expérience de nouveaux mondes, de nouveaux lieux, et intègre un important réseau associatif de parents à la recherche de leurs enfants disparus…
« Taking Off demeure le meilleur film de Milos Forman fait en Amérique et sur l’Amérique. »
Village Voice
Premier film de Milos Forman réalisé aux États-Unis, Taking Off est une satire douce-amère de la société américaine des années 70 et de son conflit générationnel. En prenant le contrepied des teen movies et en choisissant de suivre le parcours des parents plutôt que celui de leur fille, Forman dresse un portrait maniacodépressif du milieu bourgeois new-yorkais, dépassé par les pulsations de l’époque mais mourant d’envie d’y tremper les lèvres. Au milieu d’un casting d’adolescents issus de mouvements contre-culturels (la jeune Linnea Heacock, repérée par le cinéaste dans Central Park), quelques visages connus traversent le film : la chanteuse Carly Simon, encore anonyme, l’actrice Kathy Bates à 22 ans, ou encore Ike et Tina Turner en guest stars. Huit années avant Hair, Milos Forman imagine déjà des scènes qui resteront cultes, comme celle où les parents essayent la marijuana pour tenter de comprendre leurs enfants, ou la délirante partie de strip-poker entre adultes déchaînés. Avec sa forme hétéroclite qui mêle séquences semi-documentaires, purs délires narratifs et morceaux choisis d’auditions de jeunes chanteurs, Taking Off est un symbole du cinéma indépendant, entre protest film et constat artistique amer.
« Forman a mis dans son propos une telle force de conviction qu’elle le hisse à l’universalité. »
Gilles Jacob
« Le tournant de la carrière de Forman, qui le mena des couloirs de l’école de cinéma de Prague au podium des Oscars, demeure un parfait exemple de la façon dont un réalisateur étranger peut apporter un regard extérieur sur l’Amerikkka de Nixon et en faire jaillir du sang. »
Time Out - New York
Après le scandale déclenché en Tchécoslovaquie par Au feu, les pompiers !, Forman choisit de s’exiler aux États-Unis durant le Printemps de Prague. Le cinéaste arrive à New York dans un contexte favorable aux productions indépendantes, à la suite du succès d’Easy Rider, et bénéficie d’une nouvelle politique d’Universal qui cherche à produire des films pour moins d’un million de dollars. Réalisé dans des conditions que le cinéaste qualifie de « familiales », sans « aucune vedette, aucune barrière, ni coiffeur, ni maquilleur, ni loge, ni caravane », Taking Off souffle un vent d’indépendance sur le cinéma américain d’alors, propice à la thématique de prédilection de Forman : la soif de liberté individuelle, étouffée par les tendances conservatrices des structures collectives, familiales ou sociales. Malgré un échec relatif aux États-Unis, le film permet d’asseoir la renommée internationale de Milos Forman, notamment grâce au Grand Prix Spécial du Jury remporté à Cannes, et propulse sa carrière américaine vers un nouveau chef-d’oeuvre, Vol au-dessus d’un nid de coucou.
« On a eu l'idée, Jean-Claude Carrière et moi, de faire un film sur les hippies américains. On avait loué une toute petite maison à 3 et on écoutait les histoires autour de nous sur les hippies. Puis on est allé les observer mais on les a trouvés terriblement ennuyeux. Ils ne faisaient que fumer, dormir et mendier à longueur de temps. En fait, le véritable drame se jouait chez les parents de ces enfants fugueurs. On a donc décidé de faire un film sur eux, mon premier au États-Unis, Taking Off. »
Milos Forman
TAKING OFF
Un film de Milos FORMAN | Comédie Dramatique | États-Unis | 1971 | 93mn | Couleurs | 1.85
Réalisation : Milos Forman
Scénario : Milos FORMAN, John GUARE, Jean-Claude CARRIÈRE & John KLEIN
Avec : Lynn CARLIN, Buck HENRY, Linnea HEACOCK, Georgia ENGEL, Tony HARVEY, Audra LINDLEY & Paul BENEDICT
Directeur de la photographie : Miroslav ONDRÍCEK
Montage : John CARTER
Producteur : Alfred W. CROWN
Production : Universal Pictures
http://www.lemonde.fr/idees/article/201 ... _3232.html
Lever de rideau
L'Amérique des ados hippies vue par Milos Forman
LE MONDE | 10.07.10 | 13h39 • Mis à jour le 10.07.10 | 15h26
Devant la caméra, des jeunes gens se succèdent pour interpréter, plutôt très mal, une chanson de leur choix. S'ils ne portaient pas des chemises à fleurs, s'ils n'avaient pas ces cheveux longs et ces yeux perdus dans le vide caractéristiques de la génération du "Summer of love", on les confondrait avec des candidats au casting de la "Nouvelle Star".
Rencontrés par Milos Forman et Jean-Claude Carrière à New York, autour de l'appartement qu'ils avaient loué, en 1968, à St Marks Place, point névralgique du mouvement hippie, ces garçons et ces filles ont offert leurs visages et leurs voix éraillées au cinéaste tchèque Milos Forman pour Taking Off, son premier film américain (1971), qui ressort en France le 14 juillet. Sous forme de vignettes, leurs apparitions ponctuent le film et lui donnent sa tonalité si particulière, à la fois émouvante et extraordinairement comique.
"C'est le seul film qui ait été réalisé sur le mouvement hippie pendant qu'il se déroulait, affirme Jean-Claude Carrière, qui s'est prêté à une interview pour l'occasion. Janis Joplin venait souvent chez nous à l'époque. Elle est morte cinq mois après la fin du tournage, C'était déjà la fin." Inspiré du phénomène des "runaway kids", ces adolescents qui quittaient leurs familles pour rejoindre le mouvement à la fin des années 1960, Taking Off apparaît comme une satire sociale grinçante et tendre à la fois, en même temps qu'un document saisissant sur l'Amérique de l'époque.
Produit par les studios Universal, alors désireux d'exploiter le filon des petits films libres et pas chers qui faisaient le succès du Nouvel Hollywood naissant, le projet résulte d'une idée avortée de Claude Berri.
De retour de Londres où il avait vu Hair au théâtre, le producteur français avait proposé à Milos Forman d'en faire une adaptation pour le cinéma. Berri échoua à obtenir les droits, mais l'idée d'un film sur les hippies fit son chemin, et le cinéaste tchèque (qui réalisera finalement Hair en 1979) s'installa à New York au début de l'année 1968 pour s'y atteler. Jean-Claude Carrière le rejoignit en mars.
Les deux hommes s'étaient rencontrés deux ans plus tôt dans un festival, étaient devenus amis, et Milos Forman s'était installé à Paris, chez Jean-Claude Carrière. "Nous ne connaissions pas New York. Nous sommes arrivés au moment de l'assassinat de Martin Luther King, des émeutes de Harlem... On est tombés dans une tribu totalement nouvelle, des jeunes gens partis de chez eux, qui parlaient un langage inconnu, fumaient des substances inconnues, ne bougeaient pas... Tout le monde couchait avec tout le monde, c'était sidérant. Mais nous étions prudents : nous faisions très attention à ne pas coucher avec des "underaged" ("mineurs"), nous savions que cela risquait de nous causer de graves problèmes avec la justice."
La singularité de Taking Off tient, entre autres, au point de vue des auteurs, qui se sont concentrés sur un couple de parents d'enfants fugueurs plutôt que sur leur progéniture. De fait, Jeanny, l'héroïne, est quasiment absente du film. Elle le traverse comme un fantôme, par flashs, au gré des retours au bercail qu'elle effectue entre deux fugues. A l'image de Linnea Heacock en somme, la jeune actrice qui lui prête ses traits, que les auteurs avaient rencontrée à Central Park et qui a disparu de la circulation sitôt le film fini.
"Nous avions 36-37 ans, c'est-à-dire plutôt l'âge des parents, explique Jean-Claude Carrière. Nous avons voulu faire un film sur l'absence. She's leaving Home, une très belle chanson des Beatles sur le thème des runaway, nous a accompagnés pendant le processus d'écriture."
Confrontés à la disparition de leur fille, les parents - un employé de bureau en pleine crise de la quarantaine et son épouse, une femme au foyer pincée - voient vaciller les certitudes sur lesquelles ils ont construit leur vie. Au fil de leur découverte de la culture hippie, ils en viennent à s'adonner aux plaisirs transgressifs de la drogue et de la libération du corps.
Après une interruption de plusieurs mois - au cours desquels Forman et Carrière ont assisté, en 1968, à l'annulation du Festival de Cannes où ils devaient présenter Au feu les pompiers !, puis à la répression du "printemps de Prague" par les chars soviétiques -, l'écriture a repris à New York. Les deux hommes se sont beaucoup documentés et, à partir de cette base qui donne au film sa facture très réaliste, s'en sont donné à coeur joie pour propulser certaines scènes vers des sommets d'humour barjot.
Prix spécial du jury à Cannes en 1971, Taking Off fut un succès en Europe, mais passa inaperçu aux Etats-Unis. Pour Forman, la reconnaissance par son pays d'adoption viendra avec son film suivant, Vol au-dessus d'un nid de coucou.
Isabelle Regnier
Article paru dans l'édition du 11.07.10
© Le Monde.fr
Raphaël C.
11.07.10 | 18h06
Excellent film, qui mérite vraiment le détour. « Ils en viennent à s'adonner aux plaisirs transgressifs de la drogue » : Mme Régnier, "la" drogue, ça n'existe pas. Il n'y a que des substances psychoactives, licites ou non. Dans cette scène d'anthologie, très réaliste, à voir absolument, et à apprécier sans modération, il s'agit de cannabis.
Film à voir absolument, notamment pour la scène d’anthologie très réaliste de parents d’enfants fugueurs qui s’essayent au cannabis pour “comprendre” leurs jeunes...
Le titre est un jeu de mots : “Taking Off” signifie “décoller”, mais aussi “déshabiller” (qu'il s'agisse des jeunes hippies ou des parents défoncés jouant au strip-poker).
(je voulais mettre un peu ce texte en forme mais que c'est merdique ! rien ne marche).
http://carlottavod.com/film-305-taking-off.html
"Taking off”, film de Milos Forman (1971)
Une brillante satire sociale par l’auteur de Hair
Sortie en salles le 14 juillet 2010.
Copies neuves.
Festival de Cannes 1971
Grand prix spécial du jury
Synopsis
Larry Tyne traverse une crise de la quarantaine bien canalisée par son psy, et son épouse Lynn joue parfaitement son rôle de femme au foyer de la moyenne bourgeoisie newyorkaise. À plusieurs reprises, leur fille Jeannie fugue pour rejoindre un groupe de jeunes gens rassemblés autour d’idéaux alternatifs tels que la folk music, la libération sexuelle et les drogues douces. Lorsque Larry part retrouver sa trace à travers Manhattan, il découvre toute une population déviante, fait l’expérience de nouveaux mondes, de nouveaux lieux, et intègre un important réseau associatif de parents à la recherche de leurs enfants disparus…
« Taking Off demeure le meilleur film de Milos Forman fait en Amérique et sur l’Amérique. »
Village Voice
Premier film de Milos Forman réalisé aux États-Unis, Taking Off est une satire douce-amère de la société américaine des années 70 et de son conflit générationnel. En prenant le contrepied des teen movies et en choisissant de suivre le parcours des parents plutôt que celui de leur fille, Forman dresse un portrait maniacodépressif du milieu bourgeois new-yorkais, dépassé par les pulsations de l’époque mais mourant d’envie d’y tremper les lèvres. Au milieu d’un casting d’adolescents issus de mouvements contre-culturels (la jeune Linnea Heacock, repérée par le cinéaste dans Central Park), quelques visages connus traversent le film : la chanteuse Carly Simon, encore anonyme, l’actrice Kathy Bates à 22 ans, ou encore Ike et Tina Turner en guest stars. Huit années avant Hair, Milos Forman imagine déjà des scènes qui resteront cultes, comme celle où les parents essayent la marijuana pour tenter de comprendre leurs enfants, ou la délirante partie de strip-poker entre adultes déchaînés. Avec sa forme hétéroclite qui mêle séquences semi-documentaires, purs délires narratifs et morceaux choisis d’auditions de jeunes chanteurs, Taking Off est un symbole du cinéma indépendant, entre protest film et constat artistique amer.
« Forman a mis dans son propos une telle force de conviction qu’elle le hisse à l’universalité. »
Gilles Jacob
« Le tournant de la carrière de Forman, qui le mena des couloirs de l’école de cinéma de Prague au podium des Oscars, demeure un parfait exemple de la façon dont un réalisateur étranger peut apporter un regard extérieur sur l’Amerikkka de Nixon et en faire jaillir du sang. »
Time Out - New York
Après le scandale déclenché en Tchécoslovaquie par Au feu, les pompiers !, Forman choisit de s’exiler aux États-Unis durant le Printemps de Prague. Le cinéaste arrive à New York dans un contexte favorable aux productions indépendantes, à la suite du succès d’Easy Rider, et bénéficie d’une nouvelle politique d’Universal qui cherche à produire des films pour moins d’un million de dollars. Réalisé dans des conditions que le cinéaste qualifie de « familiales », sans « aucune vedette, aucune barrière, ni coiffeur, ni maquilleur, ni loge, ni caravane », Taking Off souffle un vent d’indépendance sur le cinéma américain d’alors, propice à la thématique de prédilection de Forman : la soif de liberté individuelle, étouffée par les tendances conservatrices des structures collectives, familiales ou sociales. Malgré un échec relatif aux États-Unis, le film permet d’asseoir la renommée internationale de Milos Forman, notamment grâce au Grand Prix Spécial du Jury remporté à Cannes, et propulse sa carrière américaine vers un nouveau chef-d’oeuvre, Vol au-dessus d’un nid de coucou.
« On a eu l'idée, Jean-Claude Carrière et moi, de faire un film sur les hippies américains. On avait loué une toute petite maison à 3 et on écoutait les histoires autour de nous sur les hippies. Puis on est allé les observer mais on les a trouvés terriblement ennuyeux. Ils ne faisaient que fumer, dormir et mendier à longueur de temps. En fait, le véritable drame se jouait chez les parents de ces enfants fugueurs. On a donc décidé de faire un film sur eux, mon premier au États-Unis, Taking Off. »
Milos Forman
TAKING OFF
Un film de Milos FORMAN | Comédie Dramatique | États-Unis | 1971 | 93mn | Couleurs | 1.85
Réalisation : Milos Forman
Scénario : Milos FORMAN, John GUARE, Jean-Claude CARRIÈRE & John KLEIN
Avec : Lynn CARLIN, Buck HENRY, Linnea HEACOCK, Georgia ENGEL, Tony HARVEY, Audra LINDLEY & Paul BENEDICT
Directeur de la photographie : Miroslav ONDRÍCEK
Montage : John CARTER
Producteur : Alfred W. CROWN
Production : Universal Pictures
http://www.lemonde.fr/idees/article/201 ... _3232.html
Lever de rideau
L'Amérique des ados hippies vue par Milos Forman
LE MONDE | 10.07.10 | 13h39 • Mis à jour le 10.07.10 | 15h26
Devant la caméra, des jeunes gens se succèdent pour interpréter, plutôt très mal, une chanson de leur choix. S'ils ne portaient pas des chemises à fleurs, s'ils n'avaient pas ces cheveux longs et ces yeux perdus dans le vide caractéristiques de la génération du "Summer of love", on les confondrait avec des candidats au casting de la "Nouvelle Star".
Rencontrés par Milos Forman et Jean-Claude Carrière à New York, autour de l'appartement qu'ils avaient loué, en 1968, à St Marks Place, point névralgique du mouvement hippie, ces garçons et ces filles ont offert leurs visages et leurs voix éraillées au cinéaste tchèque Milos Forman pour Taking Off, son premier film américain (1971), qui ressort en France le 14 juillet. Sous forme de vignettes, leurs apparitions ponctuent le film et lui donnent sa tonalité si particulière, à la fois émouvante et extraordinairement comique.
"C'est le seul film qui ait été réalisé sur le mouvement hippie pendant qu'il se déroulait, affirme Jean-Claude Carrière, qui s'est prêté à une interview pour l'occasion. Janis Joplin venait souvent chez nous à l'époque. Elle est morte cinq mois après la fin du tournage, C'était déjà la fin." Inspiré du phénomène des "runaway kids", ces adolescents qui quittaient leurs familles pour rejoindre le mouvement à la fin des années 1960, Taking Off apparaît comme une satire sociale grinçante et tendre à la fois, en même temps qu'un document saisissant sur l'Amérique de l'époque.
Produit par les studios Universal, alors désireux d'exploiter le filon des petits films libres et pas chers qui faisaient le succès du Nouvel Hollywood naissant, le projet résulte d'une idée avortée de Claude Berri.
De retour de Londres où il avait vu Hair au théâtre, le producteur français avait proposé à Milos Forman d'en faire une adaptation pour le cinéma. Berri échoua à obtenir les droits, mais l'idée d'un film sur les hippies fit son chemin, et le cinéaste tchèque (qui réalisera finalement Hair en 1979) s'installa à New York au début de l'année 1968 pour s'y atteler. Jean-Claude Carrière le rejoignit en mars.
Les deux hommes s'étaient rencontrés deux ans plus tôt dans un festival, étaient devenus amis, et Milos Forman s'était installé à Paris, chez Jean-Claude Carrière. "Nous ne connaissions pas New York. Nous sommes arrivés au moment de l'assassinat de Martin Luther King, des émeutes de Harlem... On est tombés dans une tribu totalement nouvelle, des jeunes gens partis de chez eux, qui parlaient un langage inconnu, fumaient des substances inconnues, ne bougeaient pas... Tout le monde couchait avec tout le monde, c'était sidérant. Mais nous étions prudents : nous faisions très attention à ne pas coucher avec des "underaged" ("mineurs"), nous savions que cela risquait de nous causer de graves problèmes avec la justice."
La singularité de Taking Off tient, entre autres, au point de vue des auteurs, qui se sont concentrés sur un couple de parents d'enfants fugueurs plutôt que sur leur progéniture. De fait, Jeanny, l'héroïne, est quasiment absente du film. Elle le traverse comme un fantôme, par flashs, au gré des retours au bercail qu'elle effectue entre deux fugues. A l'image de Linnea Heacock en somme, la jeune actrice qui lui prête ses traits, que les auteurs avaient rencontrée à Central Park et qui a disparu de la circulation sitôt le film fini.
"Nous avions 36-37 ans, c'est-à-dire plutôt l'âge des parents, explique Jean-Claude Carrière. Nous avons voulu faire un film sur l'absence. She's leaving Home, une très belle chanson des Beatles sur le thème des runaway, nous a accompagnés pendant le processus d'écriture."
Confrontés à la disparition de leur fille, les parents - un employé de bureau en pleine crise de la quarantaine et son épouse, une femme au foyer pincée - voient vaciller les certitudes sur lesquelles ils ont construit leur vie. Au fil de leur découverte de la culture hippie, ils en viennent à s'adonner aux plaisirs transgressifs de la drogue et de la libération du corps.
Après une interruption de plusieurs mois - au cours desquels Forman et Carrière ont assisté, en 1968, à l'annulation du Festival de Cannes où ils devaient présenter Au feu les pompiers !, puis à la répression du "printemps de Prague" par les chars soviétiques -, l'écriture a repris à New York. Les deux hommes se sont beaucoup documentés et, à partir de cette base qui donne au film sa facture très réaliste, s'en sont donné à coeur joie pour propulser certaines scènes vers des sommets d'humour barjot.
Prix spécial du jury à Cannes en 1971, Taking Off fut un succès en Europe, mais passa inaperçu aux Etats-Unis. Pour Forman, la reconnaissance par son pays d'adoption viendra avec son film suivant, Vol au-dessus d'un nid de coucou.
Isabelle Regnier
Article paru dans l'édition du 11.07.10
© Le Monde.fr
Raphaël C.
11.07.10 | 18h06
Excellent film, qui mérite vraiment le détour. « Ils en viennent à s'adonner aux plaisirs transgressifs de la drogue » : Mme Régnier, "la" drogue, ça n'existe pas. Il n'y a que des substances psychoactives, licites ou non. Dans cette scène d'anthologie, très réaliste, à voir absolument, et à apprécier sans modération, il s'agit de cannabis.