Le Collectif de recherche d’information cannabique (CIRC) relève, parmi les témoignages et commentaires à propos des troubles dans certains quartiers des périphéries des villes, que les relations conflictuelles entre police et « jeunes des cités » sont souvent invoquées parmi les causes – elles sont même l’élément déclencheur des premiers troubles à Clichy.
Pratiquement à égalité avec le chômage massif ou les diverses discriminations racistes ressenties au quotidien, ces « jeunes des cités » dénoncent de manière unanime le comportement des policiers sur le terrain à leur égard, parfois vidéo à l’appui. L’exemple vient d’en haut, où on parle sans cesse de « racaille », d’« économie parallèle », où l’on réfute vigoureusement le terme de « grand frère » au profit de celui de « caïd »… Amalgames, confusions et généralités constituent comme d’habitude la méthode d’analyse de la classe politique.
Parmi les différentes âneries entendues à ce propos, le CIRC a retenu en premier celle affirmant que, derrière ces débordements coûteux, il y a les caïds de l’économie parallèle, les bandes organisées de dealers qui veulent reprendre la main sur leur quartier. Or rien n’est plus nuisible au « business » que ces quartiers en feu et ces affrontements avec la police.
Ce qui est vrai, en revanche, c’est que les lois sur les stupéfiants sont très, très souvent employées pour servir de prétexte aux contrôles et fouilles répétés des policiers, permettant de maintenir en permanence une pression, avec comme résultat de très nombreuses gardes à vue (et souvent plus) pour possession de quelques grammes de « shit » ou pour avoir été pris à fumer un joint. Certains chiffres avaient évoqué, au niveau national, entre un quart et un tiers de l’activité policière (contrôles ou interpellations) seulement consacrée au cannabis. Comme pour les chiffres moyens du chômage, trois à cinq fois supérieurs dans ces quartiers périphériques que la moyenne nationale, pourtant élevée, ces chiffres de l’activité policière doivent être perçus aussi comme bien supérieurs dans ces zones. La conséquence immédiate de la politique de prohibition dans ces quartiers est de ranger de facto un nombre impressionnant de ces jeunes dans la catégorie des « délinquants », et les orienter ainsi dans cette voie dangereuse, ne leur laissant guère le choix, car la voie sociale « normale » leur sera désormais interdite.
Le CIRC ne nie pas pour autant que l’« économie parallèle » liée au cannabis puisse générer des troubles et nuisances, quand le statut de ce produit livre sa distribution, en gros, parfois au grand banditisme. Le CIRC a déjà proposé un modèle de légalisation qui en finirait avec cette économie parallèle particulière, sans doute la plus importante, et qui permettrait d’éviter bien des facteurs d’exclusion, qui du reste ne frappent pas que ces catégories socialement défavorisées ou ces tranches d’âge.