Des toxicomanes toujours plus jeunes et précarisés(Le Monde)

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Des toxicomanes toujours plus jeunes et précarisés(Le Monde)

Messagepar Anonymous » 21 Jan 2013, 03:51

LE MONDE | 05.11.04 | 15h06


Le rapport pour 2003 de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies souligne que les usagers de drogue de 15-24 ans, bien plus nombreux, ont un comportement spécifique : ils prennent à 85 % du cannabis, davantage d'ecstasy et surtout, pour un tiers d'entre eux, du Subutex.
Ils sont plus jeunes, consomment fréquemment plusieurs types de drogues et sont plus fortement précarisés que leurs aînés.

Ce rajeunissement de la population des toxicomanes en France est le phénomène le plus marquant en 2003, selon le rapport national du dispositif Trend, que l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) vient de mettre en ligne sur son site (http://www.ofdt.fr ). Les autres tendances sont la poursuite de la progression de l'usage de cocaïne et l'engouement pour la consommation de substances hallucinogènes naturelles (champignons).

Le rapport Trend fait la synthèse des données fournies par un réseau national de 12 sites d'observation en France (dont 9 en métropole), qui réalise notamment l'enquête "première ligne", par le dispositif d'observation des drogues de synthèse et, enfin, par des partenariats avec des organismes publics. Il "vise à fournir de façon précoce des informations sur les usages et les usagers de drogues illicites et sur les phénomènes émergents qui leur sont liés", précise Jean-Michel Costes, directeur de l'OFDT, un organisme financé par la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT).

Le travail d'observation a été mené dans deux milieux distincts. Le premier est l'espace urbain, qui recoupe une population estimée à 160 000 personnes et qui était dominé, dans le passé, par les consommateurs d'héroïne.

Les renseignements sur cet espace sont obtenus auprès des structures dites "de bas seuil", en première ligne pour l'accueil des toxicomanes, et par des observations de rue ou d'habitats marginaux. Le second milieu est l'"espace festif", principalement techno, et englobe les free parties, les raves, les teknivals, mais aussi les discothèques, boîtes et bars.

Le rapport 2003 met en évidence un rajeunissement des populations rencontrées dans la rue ou dans les structures de première ligne (boutiques, programmes d'échange de seringues).

Les observations du dispositif Trend ont en effet identifié trois sous-groupes de jeunes usagers qui n'apparaissaient pas de manière significative auparavant. Un premier est constitué par "des personnes fortement marquées par la culture techno, revendiquant certaines formes de marginalité" (errance, nomadisme). Des personnes en rupture avec leur famille et avec une faible insertion sociale représentent un deuxième sous-groupe.

Le troisième est constitué de personnes récemment immigrées, en particulier en provenance d'Europe de l'Est, plutôt consommatrices de stimulants. Les deux premiers sous-groupes se trouvent à l'intersection des deux espaces étudiés - urbain et "festif" -, ce qui a pour effet de décloisonner les pratiques et les consommations.

MOINS D'OPIACÉS

Les pratiques de ces 15-24 ans diffèrent en partie de celles de leurs aînés. Pratiquement, la totalité d'entre eux a consommé du tabac (92 %), du cannabis (85 %) et de l'alcool (80 %) au cours du mois écoulé. C'est au sein de cette tranche d'âge que la proportion d'utilisateurs quotidiens de cannabis est la plus élevée (68 %, contre 61 % chez les 25 ans et plus).

De même, au cours du mois écoulé avant l'enquête, le taux de consommation de stimulants et d'hallucinogènes a été plus important que pour les usagers plus âgés, à l'inverse de ce qui est observé pour les opiacés.

Les stimulants les plus présents chez les 15-24 ans sont l'ecstasy (59 %, contre 23 % pour les 25 ans et plus) et le chlorhydrate de cocaïne - sous forme de poudre - (42 % contre 33 %). Les champignons figurent au premier rang des hallucinogènes (30 %, contre 9 % chez leurs aînés), suivis par le LSD (23 % contre 7 %).

Moins consommateurs d'opiacés, en dehors du "rachacha" (dérivé du pavot, surnommé "opium bas de gamme"), les jeunes toxicomanes utilisent pour un tiers d'entre eux de la buprénorphine à haut dosage (Subutex), détournée de son usage comme traitement de substitution, et pour un quart de l'héroïne.

Le mode de consommation privilégié des 15-24 ans est le "sniff" - consommation par voie nasale - (57 % contre 28 % des 25 ans et plus), alors que 28 % pratiquent l'injection de drogue (contre 40 % de leurs aînés).

Enfin, dans cette population jeune, le taux d'infection par les virus du sida (6 %) ou des hépatites B et C (3 % et 17 %) demeure faible, mais ces chiffres sont à relativiser : environ un jeune sur deux seulement a pratiqué une fois dans sa vie un test de dépistage.

HALLUCINOGÈNES NATURELS

Le reste de cette vaste enquête confirme plusieurs phénomènes. A l'inverse de ce qui est observé pour l'héroïne, qui régresse dans l'espace urbain sans progresser significativement dans l'espace festif, l'usage de cocaïne poursuit sa progression, dans ces deux milieux.

Dans l'un comme dans l'autre, plus d'un tiers des usagers en ont consommé au cours du mois écoulé et "les profils sociaux des usagers de ce produit se diversifient", notent les auteurs du rapport, puisque la cocaïne concerne aussi bien des marginaux que des personnes à revenus élevés. A noter, enfin, que le Subutex est devenu "l'opiacé le plus consommé devant l'héroïne, et qu'au cours du mois écoulé, 4 toxicomanes sur 10 en ont usé".

Dernière tendance marquante de ce rapport, la vogue des hallucinogènes naturels. "Les champignons hallucinogènes bénéficient d'une image positive parmi leurs consommateurs, qui les assimilent souvent à des produits bio. Plus déconnectés du trafic que d'autres substances ou accessibles par l'Internet, ils font aussi l'objet d'une cueillette saisonnière", décrit le docteur Pierre-Yves Bello, responsable du dispositif Trend. Classées comme stupéfiants, ces substances sont surtout consommées dans l'espace festif, mais aussi dans l'espace urbain (14 % de consommateurs au cours du mois écoulé).

Paul Benkimoun


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Une population désocialisée


Les jeunes usagers de drogue, dont le rapport Trend pour l'année 2003 souligne l'augmentation, ne diffèrent pas de leurs aînés par la seule nature de leur consommation. Les chercheurs soulignent que la "situation de souffrance sociale" dans la tranche 15-24 ans de la population étudiée est plus importante que pour les plus de 25 ans. L'enquête portant sur les usagers des structures de première ligne met en avant le profil standard d'un homme (80 % des usagers), âgé en moyenne d'une trentaine d'années, sans emploi et dont le niveau d'études est inférieur au baccalauréat. Mais la situation apparaît pire chez les plus jeunes. Plus de 6 sur 10 déclarent vivre dans un logement précaire ou ne pas avoir de logement, contre un peu plus de 4 sur 10 pour leurs aînés. Alors qu'ils représentent 26 % de la population étudiée, les 15-24 ans comptent pour 45 % des personnes ne bénéficiant d'aucune couverture sociale. Enfin, 37 % des 15-24 ans déclarent ne disposer d'aucunes ressources, contre 8 % pour les plus de 25 ans, qui peuvent bénéficier du revenu minimal d'insertion (RMI).

• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 06.11.04
Anonymous
 



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