Article du journal LeSoir du 19/11/2003
Drogues - Le jugement du président Panier dénonce le caractère ambigu des discours ambiants sur l'usage du cannabis
Un fumeur de cannabis acquitté faute de politique claire
Le président du tribunal de Namur, Christian Panier, vient, dans un jugement en matière de stupéfiants, de retenir l'« erreur invincible » pour acquitter un fumeur de cannabis, le discours politique ambiant ayant pu laisser croire que c'était permis. C'est une première. Le parquet a interjeté appel.
En droit, l'erreur invincible est celle que tout homme raisonnable et prudent peut commettre. Elle est régulièrement plaidée en matière de drogue et systématiquement écartée par les juges.
Grégory, 23 ans, avait était intercepté alors qu'il détenait un gramme de haschisch. Son avocat, Me Poelaert, avait invoqué l'erreur invincible en rappelant que des responsables politiques avaient souvent laissé croire que détenir du hasch pour sa consommation personnelle était dorénavant toléré.
L'argument a convaincu le président Panier qui présidait l'audience correctionnelle et qui a acquitté Grégory. Le jugement indique que la prévention est justifiée par l'erreur invincible qu'ont légitimement pu entraîner chez le jeune homme les propos régulièrement tenus, et largement diffusés, par de nombreux responsables du pouvoir exécutif relativement à la détention et à la consommation personnelle de drogue dite douce.
Comment cette infraction se retrouve-t-elle en correctionnelle ? Le parquet écarte sa responsabilité : un tel dossier est souvent classé sans suite, mais, commente la substitute Véronique Laurent, il a été mis à l'instruction pour permettre une perquisition. Dès cet instant, le parquet n'est plus maître des poursuites.
Pour le parquet, la prévention doit faire l'objet d'une sanction, même symbolique, ou d'un acquittement, mais alors sur la base de l'absence de faute et pas de l'erreur invincible.
Aussitôt la décision rendue, le parquet a signé l'acte d'appel. Mme Laurent explique qu'il s'agit de réagir par principe. Il n'est pas question de s'acharner sur un toxicomane, mais bien d'empêcher que le jugement fasse jurisprudence. Personne ne peut ignorer la loi : la détention de drogue est toujours interdite.·