Un fichier des consommateurs de cannabis à l'étude (LEMONDE.FR)
La CNIL a émis des réserves sur la création d'un fichier spécifique, comme sur une inscription de l'usage de drogue sur des fichiers dépendant de la police.
La mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt), qui vient de remettre un rapport à Jean-Pierre Raffarin, envisage l'inscription des consommateurs de stupéfiants sur un fichier, en particulier ceux de cannabis, selon des sources proches du dossier. Dans un rapport récemment remis au premier ministre, la Mildt juge une telle inscription indispensable à une "traçabilité des procédures" qui permettrait un traitement spécifique des récidivistes, selon ces sources.
Dimanche, sur M6, M. Raffarin a recommandé une "contravention modeste pour le premier fumeur", et s'est dit favorable à une graduation des peines. Or les contraventions autres que les amendes de 5e catégorie, prononcées par les tribunaux de police, ne laissent pas de traces une fois payées. Une inscription sur un fichier des usagers de drogues répondrait aux vœux d'une grande partie des élus de la majorité, qui entend apporter une réponse répressive spécifique aux récidivistes. Ce souhait avait notamment été exprimé dans un rapport sénatorial en juin.
LA CNIL RÉSERVÉE
La Mildt a récemment demandé un avis sur le sujet à la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) qui vient de lui répondre par courrier. La CNIL a émis des réserves sur la création d'un fichier spécifique, comme sur une inscription de l'usage de drogue sur des fichiers dépendant de la police. En cas de volonté du législateur de garder trace de l'usage de stupéfiants, la CNIL plaiderait pour une utilisation nouvelle du casier judiciaire.
Lors des réunions interministérielles de la Mildt durant l'été, l'idée d'un fichier des consommateurs de cannabis a été émise par des représentants du ministère de l'intérieur. L'objectif était de disposer d'un outil semblable au fichier des "contrevenants d'usage" de la SNCF, géré à Rennes par la société nationale sous le contrôle strict de la CNIL. Une onzième infraction dans l'année constatée dans un train devient un délit passible de peines d'amendes lourdes, voire prison ferme ou avec sursis. Dans le cas de l'usage de drogue, "cinq réitérations dans l'année pourraient faire rentrer dans un schéma plus dur" que la "contravention modeste" évoquée par Jean-Pierre Raffarin, selon une source proche du dossier. Au bout d'un an, en cas de non-récidive, l'amende pour usage serait effacée.
Reste pour M. Raffarin à trancher entre ceux qui souhaiteraient que la menace de prison demeure pour ces multirécidivistes, et ceux qui penchent pour des amendes lourdes. La Mildt attend désormais le prochain arbitrage du premier ministre pour préparer la réforme de la loi de 1970 sur la drogue qu'il s'est engagé à mener.
Avec AFP