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Drogues
Cultures illicites, un mauvais calcul
Les cultures de pavot ou de coca n'enrichissent pas les pays. Au contraire. L'Organe international de contrôle des stupéfiants le démontre dans son rapport annuel. L'Afghanistan en est un bon exemple.

En effet, selon l'OICS, les cultures illicites sont bien sources de profits à court terme pour les petits agriculteurs, les travailleurs itinérants, le personnel des laboratoires et les autres maillons de la chaîne menant aux revendeurs. Cet enrichissement dope, de plus, la consommation dans ces pays. Mais un certain nombre de facteurs font penser que cet effet multiplicateur du revenu est moindre que celui engendré par des activités légales.
Déstabilisation
Notamment parce que les trafiquants ont l'habitude de dépenser l'argent de la drogue dans l'achat de biens importés. Les cultivateurs ne percevraient, pour leur part, que 1% du montant finalement dépensé par les consommateurs. Autre constatation: plus de 50% des revenus du trafic atterrissent dans les poches des maillons de la chaîne vivant dans les pays consommateurs, en grande majorité les pays développés.
Les profits engendrés à court terme ne feraient donc pas le poids face aux problèmes que le trafic engendre: déstabilisation de l'Etat, de l'économie et de la société civile. L'OICS prend pour exemple la situation de l'Afghanistan. Les augmentations massives de la production d'opium, au début de la dernière décennie, ont contribué à alimenter les guerres civiles alors que, parallèlement, la croissance économique et le niveau de vie ont baissé. A contrario, dans deux pays voisins, le Pakistan et l'Iran, la diminution ou l'élimination de la culture du pavot a coïncidé avec la croissance économique.
Le jeu n'en vaut donc pas la chandelle, conclut l'OICS, qui appelle les pays en développement à respecter les conventions internationales en la matière. Et les pays développés à avoir une politique de coopération allant dans ce sens.
P.D.G.
© La Libre Belgique 2003
Savoir plus
Gare à la morphine!
Outre ses mises en garde annuelles aux pays s'engageant sur la voie de la dépénalisation, voire de la libéralisation, du cannabis, l'OICS s'inquiète également de la production mondiale d'opiacés licites destinés à la médecine, notamment dans les traitements anti-douleurs, comme la morphine. Mesurée en «équivalent-morphine», la production mondiale de ces matières premières opiacées a augmenté de 35% entre 2000 et 2002, atteignant ainsi des niveaux records. Ce marché, dont la taille est désormais comparable à celui de l'héroïne et de l'opium, dépasserait de beaucoup les quantités réellement utilisées et, pour l'OICS, le risque de détournement d'une partie du stock vers des marchés illicites s'en trouve accru. L'Organe s'inquiète notamment de voir la Grande-Bretagne envisager la culture de pavot sur son territoire à des fins médicales. Il serait intéressant, affirme le rapport, de mieux répartir ces substances dans certains pays en développement dont les besoins médicaux ne sont pas rencontrés. Le rapport d'il y a trois ans se préoccupait déjà de la non-disponibilité des opiacés licites dans certains pays mais la situation n'a pas vraiment évolué depuis.