Uruguay : le président prêt à faire "marche arrière" sur la légalisation du cannabis
Par La rédaction de RTL.fr , Avec AFP | Publié le 07/08/2013 à 05h08
source : http://www.rtl.fr/actualites/info/inter ... 7763615809
Le président de l'Uruguay donne une interview exclusive à l'AFP sur le projet de loi de légalisation du cannabis le 6 août 2013.
Le projet de loi de légalisation du cannabis en Uruguay n'a pas fini de diviser l'opinion. Le président uruguayen José Mujica a dit mardi 6 août qu'il était prêt à faire "marche arrière" si l'Etat se retrouvait "dépassé" par ce projet de loi qui doit encore être ratifié par le Sénat.
"C'est une expérience", a souligné le président lors d'une interview exclusive à l'AFP. "Naturellement, comme pour toute expérience, il y a un risque et nous devons avoir l'intelligence de dire que si elle nous dépasse, nous enclencherons la marche arrière. Nous ne devons pas nous braquer."
Premier état du monde à contrôler la production et la vente du cannabis
La Chambre des députés a approuvé fin juillet un projet de loi qui, s'il est ratifié par le Sénat, ferait de ce petit pays sud-américain le premier au monde où l'Etat contrôlerait la production et la vente du cannabis.
Nous devons demander à la communauté internationale de nous aiderJosé Mujica
"Nous devons demander à la communauté internationale de nous aider", a ajouté José Mujica. Il a reconnu que ses voisins, l'Argentine et le Brésil, pouvaient avoir des "inquiétudes" en raison de ce projet de loi, "mais en même temps ils vont nous regarder avec grand intérêt". "Je crois que nous pouvons vraiment apporter quelque chose à l'humanité", a-t-il estimé. "Etre un banc d'essai qui permette de dégager des pistes pour affronter ce problème, de donner de nouveaux outils pour lutter contre les addictions à la drogue".
"Je reconnais qu'il peut y avoir des risques, il y en a sûrement", poursuit le président. "Ce qu'on sait déjà, c'est que la voie qu'on a prise jusqu'à présent n'a pas permis de régler le problème".
Registre des usagers
Le président uruguayen a souligné que l'objectif de ce projet n'était pas une libéralisation totale du cannabis mais son contrôle par l'Etat. Il a rappelé que le gouvernement prévoit de durcir les peines de prison contre ceux qui cultiveront cette drogue sans être inscrits dans un Registre des usagers.
"N'ayez pas de doute", a-t-il insisté. "Pour ceux qui ne sont pas enregistrés, nous allons tendre vers un durcissement" des peines, selon lui.
La consommation n'est actuellement pas pénalisée en Uruguay, contrairement à son commerce. Si le texte était approuvé par le Sénat, les consommateurs, résidents en Uruguay, majeurs et inscrits dans un Registre des usagers, pourraient acheter jusqu'à 40 grammes par mois dans des pharmacies autorisées.
62% sont opposés à cette loi
José Mujica avait récemment assuré qu'il tenterait de convaincre ses concitoyens, dont 62% sont opposés à cette loi selon un récent sondage, du bien-fondé de cette "expérience dans l'intérêt du monde" entier. Selon lui, ce texte vise principalement à couper les consommateurs des réseaux mafieux et à lutter contre le trafic de drogue, une lutte qui coûte chaque année quelque 80 millions de dollars (environ 60 millions d'euros) aux Uruguayens.
"Nous ne voulons pas laisser ce marché aux narcotrafiquants", a-t-il expliqué à l'AFP. "Il ne s'agit pas d'une défense de la marijuana. Aucune addiction n'est bonne". Interrogé pour savoir si ce projet de loi était un premier pas vers la légalisation future de drogues dures, José Mujica a refusé de "s'avancer à le dire à ce stade".
"Ce que je crains le plus, c'est ce qui vient. Et ce qui vient, ce sont les drogues synthétiques, celles qui sont fabriquées en laboratoires", a-t-il dit. Alors que le cannabis "est une drogue d'origine agricole, plus facile à contrôler si on le souhaite"