http://www.futura-sciences.com/fr/sinfo ... ies_12039/Le 13 juin 2007 à 14h46
Le cannabis soignerait-il les allergies ?
Par Jean-Luc Goudet - Futura-Sciences
Par hasard, des chercheurs allemands ont
découvert chez des souris qu'une famille de
molécules, présentes dans le cannabis mais aussi
fabriquées par le corps, ont un effet contre les
allergies de la peau.
Certaines souris élevées par Andreas Zimmer,
Meliha Karsak et leurs collègues de l'université
de Bonn ne supportent pas les boucles d'oreille,
plus exactement ces minuscules étiquettes fixées
sur elles pour repérer les individus. Les
malheureux rongeurs ne présentent pas une petite
inflammation locale mais déclenchent une réaction
allergique étonnamment violente avec apparition
de plaies multiples. Pourtant, jamais aucun
animal de ce laboratoire n'avaient été victime
d'une tel désagrément avec ces étiquettes
utilisées en routine.
Ces souris hypersensibles avaient une
particularité : de leur génome avaient été
retirés deux gènes codant pour deux récepteurs,
appelés CB1 et CB2, spécifiques d'une famille de
substances appelées cannabinoïdes, présentes dans
le cannabis et à l'origine de ses effets
psychotropes. Le corps lui-même produit des
endocannabinoïdes, aux rôles mal connus. Le
hasard a peut-être mis les scientifiques sur la
piste de l'un d'eux et qui toucherait à la
régulation des phénomènes inflammatoires. La
surprise n'est pas totale car on connaît depuis
longtemps les vertus médicinales du cannabis
contre les inflammations, mises à profit jusqu'à
ce que l'usage de cette plante soit interdit.
Eviter l'emballement allergique
L'équipe allemande - dont le travail est
justement d'élucider le rôle des récepteurs CB1
et CB2 - a poussé plus loin les investigations,
notamment avec l'aide de dermatologistes. Les
souris mutantes ont bien été victimes d'une
allergie, en l'occurrence au nickel, mais ont
développé une réaction disproportionnée tout à
fait anormale. De plus, en bloquant par des
produits chimiques les récepteurs CB1 et CB2 chez
des souris normales, l'équipe de dermatologistes
a obtenu le même genre de violentes réactions.
Par ailleurs, on sait que le corps réagit à la
présence d'un allergène sur la peau par une
production accrue mais temporaire
d'endocannabinoïdes. Une autre lignée mutante de
souris est venue éclairer les chercheurs. Chez
elles, cet excès est mal régulé et ces molécules
sont présentes en plus grandes quantités sous la
peau. Or, justement, elles présentent des
réactions inflammatoires bien plus faibles que la
normale.
Il apparaît donc clair que les cannabinoïdes
produits par le corps interviennent au début
d'une réaction inflammatoire pour éviter qu'elle
ne s'emballe et ne devienne plus dangereuse pour
l'organisme que la présence de l'allergène
lui-même.
Quelles possibilités médicales en tirer ? Il y a
peut-être là un moyen de lutter contre des
allergies si graves qu'elles deviennent
invalidantes. Une piste possible serait celle
d'un médicament qui retarderait la diminution
d'endocannabinoïdes survenant quelque temps après
une inflammation, les maintenant plus longtemps à
un niveau élevé. Une autre serait d'en revenir à
des pratiques révolues et de produire, sous forme
d'onguent, un extrait de cannabis ou des
cannabinoïdes artificiels à appliquer sur la peau.
Parmi les multiples effets attribués aux
molécules présentes en grandes quantités dans le
chanvre indien, peut-être tient-on un moyen de
réduire d'invalidantes allergies. Crédit : Joël
Reynaud / Université Lyon1
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