Des questions que les psychanalystes ne peuvent plus éluder,
Posté: 21 Jan 2013, 03:58
Date : 15/9/05
Source : Le Monde
Site : http://www.lemonde.fr/
URL : http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0 ... 329,0.html
Point de vue
Des questions que les psychanalystes ne peuvent plus éluder, par Philippe
Pignarre
LE MONDE | 15.09.05 | 13h10 * Mis à jour le 15.09.05 | 13h10
Comment discuter de la psychanalyse ? La publication du Livre noir de la
psychanalyse pourrait être l'occasion de confrontations intéressantes.
C'est le souhait de la plupart de ceux qui y ont participé ; lesquels, par
ailleurs, ne sont pas tous des partisans frénétiques des thérapies
comportementales.
Il y a urgence à sortir des débats très abstraits quant à savoir si la
psychanalyse est ou non une science ; ou des autres débats, faussement
concrets, qui croient résoudre le problème en préconisant des "essais
cliniques contre placebo", dont on sait pourtant qu'il est très difficile
de généraliser leur méthodologie en dehors de l'étude des médicaments
classiques.
Peut-être, peut-on procéder d'une autre façon, et s'intéresser à la manière
dont la psychanalyse réagit face à des épreuves contemporaines qui
appartiennent à son champ de compétence.
Prenons la question de l'autisme. Il faut avoir rencontré les associations
de parents d'enfants autistes pour se rendre compte de la souffrance que
leur a infligée le canon psychanalytique, tel qu'il a été formulé en
premier lieu par Bruno Bettelheim. L'idée de la responsabilité maternelle,
des "mères froides", a eu un effet dévastateur.
Pire, de nombreux psychanalystes pensaient que ces enfants devaient être
éloignés le plus possible de leurs parents, ajoutant de la souffrance à la
souffrance.
On ne peut certainement pas se tirer de cette affaire en se contentant de
dire qu'il faut "utiliser les deux méthodes" ou des choses de ce genre. Les
psychanalystes ne sont-ils pas un peu légers dans leur bilan ?
Prenons l'homosexualité. Le Manuel diagnostique et statistique des troubles
mentaux (DSM), mis au point, par consensus, par les psychiatres américains,
ne date pas de 1980. En 1952, une première édition en a été réalisée, sous
influence psychanalytique.
Mais, en 1980, les psychanalystes ont perdu le contrôle de l'American
Psychiatric Association (APA) au profit d'un courant dit "athéorique" qui
voulait abandonner la distinction psychoses/névroses.
Pourquoi ont-ils perdu cette bataille ? A cause de leur position, alors
majoritaire, sur la question de l'homosexualité. Les psychanalystes de
l'APA se sont battus comme des enragés pour que l'homosexualité continue
d'être considérée comme un trouble mental
Source : Le Monde
Site : http://www.lemonde.fr/
URL : http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0 ... 329,0.html
Point de vue
Des questions que les psychanalystes ne peuvent plus éluder, par Philippe
Pignarre
LE MONDE | 15.09.05 | 13h10 * Mis à jour le 15.09.05 | 13h10
Comment discuter de la psychanalyse ? La publication du Livre noir de la
psychanalyse pourrait être l'occasion de confrontations intéressantes.
C'est le souhait de la plupart de ceux qui y ont participé ; lesquels, par
ailleurs, ne sont pas tous des partisans frénétiques des thérapies
comportementales.
Il y a urgence à sortir des débats très abstraits quant à savoir si la
psychanalyse est ou non une science ; ou des autres débats, faussement
concrets, qui croient résoudre le problème en préconisant des "essais
cliniques contre placebo", dont on sait pourtant qu'il est très difficile
de généraliser leur méthodologie en dehors de l'étude des médicaments
classiques.
Peut-être, peut-on procéder d'une autre façon, et s'intéresser à la manière
dont la psychanalyse réagit face à des épreuves contemporaines qui
appartiennent à son champ de compétence.
Prenons la question de l'autisme. Il faut avoir rencontré les associations
de parents d'enfants autistes pour se rendre compte de la souffrance que
leur a infligée le canon psychanalytique, tel qu'il a été formulé en
premier lieu par Bruno Bettelheim. L'idée de la responsabilité maternelle,
des "mères froides", a eu un effet dévastateur.
Pire, de nombreux psychanalystes pensaient que ces enfants devaient être
éloignés le plus possible de leurs parents, ajoutant de la souffrance à la
souffrance.
On ne peut certainement pas se tirer de cette affaire en se contentant de
dire qu'il faut "utiliser les deux méthodes" ou des choses de ce genre. Les
psychanalystes ne sont-ils pas un peu légers dans leur bilan ?
Prenons l'homosexualité. Le Manuel diagnostique et statistique des troubles
mentaux (DSM), mis au point, par consensus, par les psychiatres américains,
ne date pas de 1980. En 1952, une première édition en a été réalisée, sous
influence psychanalytique.
Mais, en 1980, les psychanalystes ont perdu le contrôle de l'American
Psychiatric Association (APA) au profit d'un courant dit "athéorique" qui
voulait abandonner la distinction psychoses/névroses.
Pourquoi ont-ils perdu cette bataille ? A cause de leur position, alors
majoritaire, sur la question de l'homosexualité. Les psychanalystes de
l'APA se sont battus comme des enragés pour que l'homosexualité continue
d'être considérée comme un trouble mental